dimanche 28 février 2010

& Deux mois de vie

Je suis parmi vous depuis deux mois et j'aime bien...
Tout autour de moi, il n'y a que douceur, bisous, câlins et tendresse.
Mes parents m'ont préparé une adorable chambre pleine de couleurs chaudes et de petits zanimos  rigolos. J'ai aperçu plein de peluches et je crois que ça va pas être facile de choisir mon doudou!
On me dépose régulièrement dans un lit doux et confortable et je suis bien au chaud dans une gigoteuse toute moelleuse. Je porte de petits pyjamas (aujourd'hui, on dit des "dors bien"!) tout mimis et bien chauds.
Quand je me sens bien et tranquille, je parle aux petites bestioles colorées qui tournicotent au-dessus de mon lit. J'ai entendu dire que c'était ma maman qui avait fait cette jolie chose...

Elle est si tendre ma maman!... Elle me nourrit et j'aime bien être tout contre elle pour faire des câlins. J'aime tellement que je m'endors souvent avant d'avoir fini mon casse-croûte... Pas grave, je redemande et elle me redonne.
Mon gentil papa me prend souvent contre lui et je me sens en sécurité dans ses bras de papa... J'aime bien lui raconter des histoires quand il me change. Papa et Maman semblent ne pas tout comprendre de mes petits discours mais ça a l'air de leur faire plaisir quand je gazouille (et quand je souris!), alors je continue.

D'autres personnes, de temps en temps, se penchent sur mon berceau puis me prennent dans leurs bras. Ils s'appellent Papy et Mamie et ont l'air sympa aussi. Ils me parlent doucement, me font des bisous tout le temps, sourient en permanence en disant "Oh! Qu'il est beau!" et apportent toujours des trucs. Je verrai cela plus tard!

De temps en temps, je suis dans mon cosy ou sur un joli tapis avec une grosse vache et je vois que plein d'autres choses se passent autour de moi. Je ne sais pas encore très bien à quoi tout cela correspond mais j'ai le temps d'apprendre.

 Mes parents et le reste de la famille m'appellent "le bébé du bonheur". Je crois savoir pourquoi!

Petite main de Clément (Photo Mamie Epamin')

vendredi 26 février 2010

& Norbert & C°

En ce temps-là,  les enfants installés sur le siège arrière des véhicules avaient le droit de s'allonger sur la banquette, de s'asseoir dans n'importe quelle position et surtout, ils avaient l'autorisation de se mettre à genoux pour regarder par la vitre arrière...
Et là, quel bonheur!

Quand papa doublait un camion, vite...on se mettait à genoux et on faisait "coucou" au chauffeur!
Rares étaient les routiers qui ne nous répondaient pas d'un amical signe de la main. Notre enthousiasme était à son comble lorsque l'on avait droit, en prime, à un grand coup de klaxon ou à un sublime appel de phares!
Durant les milliers de kilomètres que nous avons parcourus, ma petite sœur et moi, avec nos parents, maints camionneurs, de tous les pays, nous ont adressé un signe amical. L'abruti, le "bécile" qui ne nous répondait pas était automatiquement traité de "Pauv' plouc!" (insulte suprême dans notre esprit d'enfant!).

Plus tard, quand je me suis retrouvée assise au volant de ma voiture, c'est ma fille qui "faisait coucou!"... Avec elle, nous avons croisé, suivi et doublé des centaines de Nono (Norbert Dentressangle avec ses beaux camions rouges!), des Darfeuille, des Transalliance, des Sotrameuse, des Quil, des BSM, les Déménageurs Bretons,  les Pneus Laurent et tant d'autres... et ils ont tous glissé un peu de bonheur dans nos longs voyages. Merci à vous, les routiers!

Aujourd'hui, plus question de "faire coucou!" à l'arrière des voitures puisque la ceinture est obligatoire pour tous les passagers mais Max Meynier avait raison quand il disait, chaque soir, sur RTL:
"Les routiers sont sympas".

Camion en marche (Photo prise par Epamin' depuis le TGV!)

jeudi 25 février 2010

& L'enfant qui parlait à...

Comme il est mignon, ce petit garçon!
Je l'ai rencontré un midi, alors qu'il était tout seul au milieu de la forêt et aussitôt, je l'ai aimé.
Ses grands yeux, ses charmantes espiègleries, son bon cœur et sa fraîcheur d'âme ont su me  ravir. Mais il ne me faut pas grand chose pour être contente, vous le savez bien!
Confiant, l'enfant m'a raconté sa troublante histoire. 
Il a été abandonné devant la porte d'un monastère par sa maman, que l'on ne retrouve pas et a été recueilli et élevé par une poignée de moines truculents mais bienveillants qui lui ont donné le prénom de Marcelino.
En grandissant,  le petit bonhomme a découvert qu'il pouvait parler aux animaux car il est né la nuit d'une millième lune.
Inlassablement, il met son fabuleux pouvoir au service des animaux et tente de faire le bien autour de lui.

Histoire mièvre diront certains (je vous passerai les mots injurieux qui sont attribués à cette production pour les enfants!) mais qui a le mérite de ne véhiculer aucune image de violence sauvage et qui me rappelle un peu l'histoire de "Belle & Sébastien"!

En cherchant si cette série de dessin animé s'inspirait d'une histoire réelle, j'ai découvert qu'un film espagnol de 1955 racontait l'histoire de Marcelino Pan y Vino, d’après le récit de José María Sánchez Silva (1911-2002), écrivain et journaliste espagnol célèbre pour ses contes pour enfants.

On ne trouve pas dans ce long métrage de petites bêtes qui parlent ni la jolie Candela,  mais on voit la bonne bouille d'un gamin souriant qui s'invente un compagnon de jeux, Manuel, qui parle avec le Christ (un peu comme Fernandel dans "Dom Camillo"!) et qui porte sur le monde adulte un regard clair!

Y'a des fois où c'est bien de garder son âme d'enfant!

mercredi 24 février 2010

& Les belles des grands chemins

Dehors, à chaque saison, on les voit mais on ne les regarde pas toujours.
Selon le temps qu'il fait, les belles des grands chemins se font coquettes ou mystérieuses, pleureuses ou radieuses.
Certaines sont très vieilles et portent les marques du temps.
D'autres, plus jeunes, regardent le ciel et se dressent fièrement.
Parfois, on remarque ici ou là, quelques blessures ou plaies
que des âmes charitables ont pansées avec bonté.

J'aime croiser ces belles dames un peu partout, ici, là-bas, car elles ont de longues et belles histoires à me raconter. Comme des aïeules fatiguées à la mémoire parfois chancelante, elles portent en elles les visages du temps passé et les épreuves endurées.

Elles m'enchantent par leur corps froid de bois, de pierre ou de fer caressé longtemps par tant de regards chauds.
Elles ne sont jamais là par hasard, les belles!
On les a posées là pour célébrer ou pour honorer, pour délimiter ou pour signaler, pour commémorer ou pour rendre grâce, pour implorer ou pour expier, pour prier ou pour protéger... et longtemps, elles guidèrent les pas et l'esprit des hommes et des femmes.

A l'entrée d'un village ou d'une ville, accolée à une maison, dans un cimetière, près d'un pont, aux abords d'une fontaine, sur une vieille pierre aux origines païennes, à la croisée des chemins, au bord d'un sentier ou d'une route, au milieu d'un pré, elles bravent le temps et les idées des hommes! Certaines sont restaurées, réhabilitées ou même déplacées et retrouvent une nouvelle jeunesse. D'autres, hélas, n'ont pas cette chance et sont dans un bien triste état...

Elles font partie de notre patrimoine au même titre que les fontaines, les ponts et les lavoirs et elles jalonnent nos promenades aux quatre coins de la France. Lorsque j'en vois une, j'imagine combien elle fut, jadis, respectée, vénérée et fleurie et j'aime l'idée qu'elle a pu apporter, à certains humains, un peu de réconfort dans des moments de détresse!

Regardez comme elles sont belles, les croix de nos chemins!


Profil de croix de village (Photo Epamin')

mardi 23 février 2010

& Une belle histoire

Comme ils étaient beaux tous les deux!

Il avait revêtu son costume de James West, son gilet de velours et son nœud papillon.
Elle avait mis ses escarpins, son élégant pantalon, sa belle tunique noir et argent et portait quelques jolis colifichets.

Comme depuis cinquante ans, leurs deux cœurs ont battu à l'unisson à l'appel de leur nom.
Comme depuis cinquante ans, ils ont marché main dans la main pour recevoir fleurs, médaille et parchemin.
Comme depuis cinquante ans, ils se sont regardés avec amour et ils ont souri avec tendresse.
Comme depuis cinquante ans, ils ont ri ensemble.
Comme depuis cinquante ans, ils ont pleuré ensemble.

Comme les amoureux de Peynet...

Oratoire sur le plateau de la Garoupe (Photo Epamin')

mercredi 17 février 2010

& V.I.P.P.

Alphabet : chapitre 16

Very Important Petit P
pour avoir :
- la Paix dans tous les Pays et pour tous les Peuples;
- une Planète Propre et Partagée équitablement;
- des Pleines Potiches d'eau Pure pour toutes les Personnes du Pôle au Pôle;
- chaque jour, au moins, du Pain, un Plat de Pâtes ou de Patates, du Pâté, une Pomme ou une Poire, un Pot de lait, une Part de Pudding pour Paul, Pablo, Paolo, Poul, Pavel, Povilas, Pavlos, Pawel, Paavo, Paulo, Poolou, Paoluo, Paki, Pongwa, Pedio, Paradzanaï, Pandu, Pra, Plaxico, Psammetichus... et leurs copines;
- une Population Planétaire Prévenue et Prudente;
- des Paysages et des Populations Protégés contre le Profit et la Pollution;
- des Parents Présents, Prévenants et Patients pour leurs Petits Poussins;
- du Papier recyclé et une Plume libre pour tous les Poètes, les Professeurs, les Philosophes et les Penseurs du monde;
- Partout des Présidents et des Possesseurs de Pouvoir Politiquement et Personnellement Potables;
- des Prisons Pleines à Perpétuité de Pédophiles mais vides de Prisonniers Politiques;
- des Paysans Propriétaires de leurs Passé, de leur Présent, de leurs Projets, de leurs Plantes, de leurs Prairies et du Pis de leurs vaches,
- une Presse libre, des Présentateurs Polis, des Programmes Passionnants qui rendent intelligents;
- des Parisiens et des Provinciaux qui Parlent le même Patois courtois;
- des vrais "Parce que" à nos "Pourquoi";
- et des "Peut-être" Possibles...


Toutes vos Propositions, vos Pensées, vos Phrases, vos mots de P... sont les Pienvenus, euh, les bienvenus...

Lettre P par Epaf

mardi 16 février 2010

& Le magicien du dimanche

Il aurait pu naître chef d'orchestre, porter une queue-de-pie et se retrouver au sommet de la gloire en guidant, d'un seul coup de baguette, mille et un musiciens. On l'applaudirait, on l'acclamerait et son nom serait écrit partout en grosses lettres.

Il aurait pu naître Président-Directeur-Général d'une grande banque et voyager dans un jet privé pour aller boire un jéroboam de Champ' à Honolulu avec de vrais faux-amis. Il aurait des gardes du corps, plusieurs maisons, plein de portefeuilles en cuir et plein de portefeuilles d'investissements.

Il aurait pu naître célèbre présentateur d'émission de variété et avoir ses entrées dans tous les coins bizarres de Paris et d'ailleurs. Il aurait sa photo dans les magazines people et dormirait exclusivement dans des hôtels trente étoiles.

Il aurait pu naître empereur d'une multinationale informatique et gagner des milliards d'euros à chaque seconde. Il serait l'homme le plus riche du monde, pourrait satisfaire tous ses caprices même les plus dispendieux et porterait des cravates jetables en soie.

Mais voilà, il n'est pas tout ça! Il est mon magicien du dimanche!

Dans le plus lointain de mes souvenirs, chaque semaine, il met des couleurs à nos dimanches...
Il tient nos petites mains d'enfants dans les siennes pour nous aider à marcher sur les "hauts" murs,
nous courons vers lui pour qu'il nous fasse tourner dans le ciel,
il nous aide à escalader des "montagnes" de lutins,
nous faisons avec lui d'interminables parties de "petits chevaux", de "mille bornes," de "huit fou" et de "rami",
il nous aide à construire nos châteaux de sable en Espagne,
il nous fait découvrir la musique et les musiciens d'ici, d'ailleurs, de maintenant et d'avant,
il nous émerveille lorsqu'il endosse son beau costume gris (on dirait James West!),
il nous emmène au bout du monde, au bord du ruisseau, au bord de la mer, dans les collines,
il nous emporte au pays de Tom Sawyer quand il joue des airs de blues sur son harmonica,


...et surtout il nous fait rire quand il se déguise,
quand il dit des bêtises,
quand il fait des taches sur sa chemise,
quand il nous raconte des histoires d'église,
quand il parle de gourmandise...

Mon magicien du dimanche habite aujourd'hui dans une jolie ville de France, tout loin de moi, hélas!
Il partage sa vie avec ma fée du samedi depuis cinquante ans.

Quand je lui parle au téléphone,
quand je parle de lui,
quand je pense à lui,
il n'est pas du tout, mais alors pas du tout
ce monsieur de soixante-douze ans que je vois, là,
en photo sur mon bureau...

Non, non, il est et restera pour toujours mon magicien du dimanche...

Harmonica (Photo La leçon du jour)

lundi 15 février 2010

& La fée du samedi

Si vous aimez les contes de fées, ce billet est pour vous... (A lire avé le vré assent du pays des cigalouns!)

Il était une fois, dans un pays où les villages chantent tout l'été et où les collines embaument la farigoulette, deux sœurs, une bien grandette et l'autre toute pitchoune qui vivaient paisiblement avec leur papa et leur maman dans un logis petit mais tout joli.

Tandis que les uns et les autres, hors de la demeure familiale, vaquaient à leurs occupations quotidiennes, qui à l'école, qui au bureau, qui au magasin, de malicieux et farceurs lutins s'installaient dans la maison vide, pendant toute la journée.
Ayant tout l'espace pour eux, ils faisaient rondes folles, galipettes et tourne-boules, tintamarre et tohu-bohu dans toutes les pièces.
Ils organisaient petits festins et grands goûters dans la cuisine et la salle à manger.
Ils jouaient à cache-cache dans les tiroirs et les armoires, au milieu des chaussettes et des chemisettes qu'ils retournaient en tous sens.
Ils sortaient tous les vêtements qu'ils trouvaient dans le panier à linge et les lançaient en riant dans la grande baignoire.
Ils sautaient sur les lits et dérangeaient tout ce qu'ils trouvaient sur les bureaux.
Ils s'amusaient avec les jeux et les jouets du placard et ne rangeaient rien...

Bref, tout ce petit peuple s'en donnait à cœur joie, chaque jour, pour bouleverser l'ordre de la maison.
Pire! Le mercredi, gnomes et farfadets entraînaient les deux fillettes dans leur joyeux tumulte en leur faisant promettre de ne rien dire à qui que ce soit de leur existence...

Et les deux petites ne disaient rien mais redoutaient que leurs père et mère ne découvr(iss)ent, un jour, la vérité...

Cela dura plusieurs mois, voire plusieurs années et durant tout ce temps, un autre mystère planait sur la maison...
Alors que durant toute la semaine, le petit peuple facétieux prenait ses quartiers dans l'appartement, le samedi, c'est une fée qui s'installait dans la place... Oui, une fée!
Dès potron-minet, elle glissait sans bruit, d'une pièce à l'autre, préparait tendrement le petit déjeuner des enfants et commençait son œuvre discrète...

Nul ne sait, à ce jour, ce que la fée faisait au cours de la matinée ni quels étaient les sortilèges qu'elle utilisait...

Mais lorsque les deux fillettes rentraient après la classe, toute la maison respirait la propreté et embaumait de senteurs appétissantes.
Les armoires et les tiroirs étaient rangés, les étagères et les bureaux soigneusement époussetés, la baignoire vidée de tout linge, brillait sous le soleil, les serviettes, torchons, mouchoirs et autres culottes d'enfants séchaient sur le balcon sous le souffle puissant du mistral et les lits, aux courtepointes parfaitement tirées, fleuraient bon les draps tout propres.

En plus, comme si tout cela ne suffisait pas, au moment du dessert, la douce fée apportait des petits ramequins remplis à ras bord de délicieuse crème à la pistache, à la praline, au chocolat ou déposait sur la table un plat d'œufs à la neige décorés de ruisseaux de caramel...

Peut-être avez-vous connu, vous aussi, une fée du samedi qui a enchanté votre enfance...

Ma fée du samedi, je vais la retrouver jeudi, en même temps que mon magicien du dimanche !

dimanche 14 février 2010

& Pas des poux mais des papous...

...dans la tête!
Maîtriser les mots et jouer avec eux, les faire résonner comme des éclats de rires, en faire de rigolos colliers de perles de langage, les assembler pour fabriquer de splendides et originales constructions de petits textes...


Voilà ce que font quelques personnes "non-comiques" de profession mais qui le deviennent le temps d'une émission radiophonique...
Chaque dimanche, de 12h45 à 14 h sur France-Culture, cinq ou six personnes au cerveau bien rempli s'amusent à relever des défis littéraires, se lâchent dans des joutes oratoires, s'éclatent avec légèreté comme des bulles de savon dans une amusante suite de l'Oulipo, pas décevante du tout...

Autour de Françoise Treussard qui tient le rôle de meneur du jeu, des personnalités artistiques de tous genres se retrouvent pour rire de leurs bons mots, pour jouer sur les rimes, pour faire des pirouettes sur la polysémie et sur la rhétorique et tous oublient d'être sérieux...

C'est vraiment très amusant de se chercher "des Papous dans la tête"!

Chapeau de papier (blog de Garance)
J'aurais pu illustrer mon billet avec un des chapeaux de Croukougnouche...

samedi 13 février 2010

& Le jour du carton

J'ai compris qu'elle m'aimait toujours le jour où elle m'a enfermé dans une boîte. Laissez-moi vous raconter...
Ce jour-là, elle me retira de mon étagère et me coucha délicatement dans un grand carton puis referma doucement le couvercle et ce fut l'obscurité.
Vu mon grand âge, ma peau en vichy bleu déchirée en maints endroits, le velours de mon museau plus qu'élimé et ma langue en lambeaux, j'étais certain que cette boîte était mon cercueil et que ce serait ma dernière demeure...
Eh ben non!

Après quelques mouvements inattendus qui, pendant de longues minutes, me bringuebalèrent de gauche et de droite, le calme revint puis j'entendis des voix d'enfants...
J'en fus tout ému car cela me rappela lorsqu'elle était toute petite et qu'elle me parlait au creux de l'oreille (z'avez vu la taille de mes oreilles? Elles pouvaient en contenir des secrets!).

Alors un adorable jeu de questions-réponses commença au dessus de ma maison en carton (pirouette-cacahuète!) puis, du fond de ma boîte, j'entendis ces réponses:
"Oh non, jamais je ne le jetterai!",
"Oui, c'est mon plus vieil ami!"
"Il connaît tous mes secrets!"
"Il n'est plus très beau mais il est depuis toujours avec moi!"
"J'y tiens beaucoup!"
"Je l'aime!".
Et les enfants s'écrièrent tout à coup: " C'est votre doudou!"

Brusquement, les rabats du carton s'écartèrent et elle me prit entre ses mains... puis me serra sur son cœur comme elle faisait quand elle était une petite fille. Cela amusa les enfants.
Elle me tourna vers eux et lança: " Les loulous, je vous présente Roudoudou, mon doudou!"
Et je vis dans les yeux des bambins, des paillettes et des étoiles: la maîtresse avait un doudou!

Elle me présenta sous toutes les coutures (c'est le cas de le dire!) : les déchirures et points de suture dans le tissu à carreaux bleus et blancs, les petits bouts de kapok qui me servaient d'entrailles, ma longue queue de chien en peluche (Attention! Je suis un chien et non un ours, pas un "teddy-bear"; faut pas confondre!), ma truffe en plastique noir fixée toujours solidement au bout de mon museau, mes yeux orangés dans la lumière, mes deux larges oreilles, mes pattes de velours (bien que je sois un chien!) et les deux petits millimètres de feutrine, qui sortaient de ma bouche, unique vestige de ma belle langue rouge d'autrefois.

Dans ces mots, dans ces gestes, dans sa douceur, je retrouvai l'enfant qu'elle avait été et je lui fus reconnaissant, en cet instant, de ne m'avoir jamais ni abîmé, ni malmené, ni martyrisé ou oublié, depuis le jour si lointain de notre rencontre...

Aujourd'hui, alors que j'approche, comme elle, la cinquantaine, j'ai toujours bon pied, bon œil. Certes, ma peau tiraille de plus en plus mais comme je ne fais guère d'exercice, les vieilles cicatrices ne se rouvrent pas.
Je suis toujours sur mon étagère et je suis heureux.
Je sais qu'elle m'aime et qu'elle m'aimera toujours.



A lire: "Otto - Autobiographie d'un ours en peluche" de Tomi Ungerer

Roudoudou (Photos Epamin')

vendredi 12 février 2010

& La première fraise


"Qu'importe ma vie !
Je veux seulement
qu'elle reste jusqu'au bout
fidèle à l'enfant que je fus.
"

de Georges Bernanos (1888-1948) écrivain français

Fillette au jardin (Photo Epamin')

mercredi 10 février 2010

& Où c'est-y donc qu'on est?

"Moi, j'te dis que c'est par ici!
- Mais bien sûr que non, c'est par là-bas! Regarde, c'est écrit là: N36! Là-haut, on a vu les L alors normalement, après, c'est les M puis les N!
- Bon ben, va voir, moi j't'attends ici; ça fait un quart d'heure qu'on tourne et tu ne veux pas demander..."
Alors, il s'éloigne, laissant là sa moitié qui, en ce jour de gala, a mis des chaussures qui lui font mal aux pieds...

Plus loin, un jeune couple d'amoureux, main dans la main, grimpe rapidement tout là-haut, au dernier rang... Une puis deux puis trois vérifications plus tard, auprès des personnes déjà assises, les deux amoureux redescendent jusqu'au premier rang pour remonter de l'autre côté des gradins... en riant!

Juste devant la scène, solitaire et très élégant dans son pardessus en cachemire, un septuagénaire, ne souhaitant pas chausser ses lunettes, par coquetterie, tente désespérément de lire son numéro de place sur son billet.
La luminosité d'une salle de spectacle ne valant pas celle d'un laboratoire, l'homme a bien du mal à savoir où il doit s'asseoir et il tourne plusieurs fois sur lui-même pour trouver le meilleur éclairage... jusqu'à ce qu'une belle jeune dame, de noir et de dentelles blanches vêtue, lui apporte son aide! Ruse de vieux dragueur?

Les deux copines éclatent de rire en entrant dans la salle. Elles ont sorti, pour l'occasion, leur petit bonnet à fleurs, leur étole à franges et leur sac à main en faux croco et, bras-dessus, bras-dessous, lorgnent par-dessus leurs lunettes les inscriptions figurant sur les chaises. Tout est prétexte à déclencher un fou-rire chez les deux vieilles dames! Quand enfin, elles trouvent leurs places, elles s'installent confortablement et rient...
Quelques minutes plus tard, une autre jolie dame en noir et blanc les expulse délicatement de leurs fauteuils de velours rouge car elles ont pris, par erreur, la place de deux messieurs! Nouveau rire en cascade qui fait plaisir à voir... Dociles, elles récupèrent bibis, boas et cabas et elles suivent la dame qui sait tout pour aller rire un peu plus loin!

On les repère de loin, eux... les râleurs permanents... L'œil terne, le visage fermé et maussade, la voix désagréable avant même d'avoir parlé... Ils inspectent d'un regard inquisiteur les places occupées et non les vides et cherchent qui sera leur proie du jour! Lorsqu'ils ont jeté leur dévolu sur un pauvre quidam sans défense, ils lancent l'attaque...
"Vous êtes à notre place, on a payé notre place, allez vous mettre à une autre place, c'est notre place..."
Deux scénarios peuvent alors suivre: soit les deux affreux, comme deux coqs sur un tas de fumier, crient victoire en prenant à témoin les personnes du voisinage et en attribuant au cuicuidam toutes sortes de noms d'oiseaux, soit le susdit quidam a plus de défenses que prévu et renvoie plus ou moins gentiment M. et Mme Casse-Bonbons sur leur strapontin de départ...


Nous, mon incroyable et moi, nous sommes assis depuis longtemps et je ne vous raconterai pas comment on a trouvé où c'était qu'on était...

Le spectacle fut excellent sur scène et très bon dans le public, ce soir-là!

Fauteuils de l'Odéon

mardi 9 février 2010

& Laissons parler les urinoirs...

Un jour, alors que je demandai à un de mes élèves comment s'appelait la boîte dans laquelle on glisse le bulletin de vote, l'enfant fit un délicieux amalgame avec "urne" et "isoloir" et me proposa "urinoir"!!!!!

Je ne pensais pas parler un jour d'élections dans mes esperluettes mais puisque le coucou de Claviers m'a taguée...
Il me demande très gentiment (merci tout plein!) si j'accepte de répondre à trois petites questions... politiques!
Il fut un temps où cela me passionnait...
Hélas, aujourd'hui, les mauvais acteurs et les piètres réalisateurs et metteurs en scène de ces pièces publiques me dérangent au plus haut point ...
Pourtant voici mes réponses:

- Voterez-vous lors de ces élections ? Merci de justifier votre réponse.


Nos anciens et nos anciennes ont lutté âprement et vaillamment pour conquérir le droit de vote pour tous. J'irai voter, comme toujours, pour que leur combat n'ait pas été inutile et que l'abstention ne signe pas à moyen ou long terme l'arrêt de mort de ce droit démocratique.


- Si oui, savez-vous déjà pour qui vous voteriez au premier tour ? Pourquoi ?

Bien sûr que oui!
Pour celui ou celle
- qui aura écrit le moins de mensonges sur ses jolis papiers recyclés,
- qui saura rester humble et réaliste dans ses projets,
- qui proposera des lendemains non pas qui chantent ni des lendemains roses mais des lendemains qui travaillent, qui gagnent et qui vivent mieux;
- qui proposera des idées au lieu de critiquer celles des autres;
- qui respectera la planète, les hommes et leurs besoins;
- qui ...

Est-ce que ça existe un tel candidat? Je verrai bien!...

- Avez-vous une idée de vote pour le second tour?*
Comme tout le monde devrait voter pour mon candidat idéal, il n'y aura pas de deuxième tour, ici, dans ma région...
Si cela devait quand même se produire, je sais déjà pour lequel je ne voterai pas!

> Et si certains parmi vous veulent raconter leurs secrets d'isoloir, poursuivez donc la chaîne régionale!...


*Vous ne croyiez tout de même pas que j'allais vous dire pour qui mon cœur balance, non?

dimanche 7 février 2010

& Ode au O ou...

Alphabet : chapitre 15

Ode à l'O

Ô vous, doux mélange d'oméga et d'omicron,
Petit caillou tout rond que l'on sème dans nos mots,
Vous êtes dans l'amour, la mort et les émoticônes,
Et vous nous faites sourire dans la tête à Toto!

Vous êtes universel quand vous êtes sanguin
Et en litres de rouge, vous coulez dans les veines...
Vous ne manquez jamais d'air chez le physicien
Qui, pour avoir de l'eau, vous lie à l'hydrogène.

Tel un seigneur, vous possédez deux beaux châteaux:
Au sud, dans l'Hérault, vous vivez dans une folie
Et si l'on vous retire votre petit chapeau,
On vous retrouve aussi en Basse-Normandie.

Les gens vous aiment bien dans la lointaine Irlande
Et tous les O'Tool, les O'Neal et les O'Connell
Ont le respect des règles et des lois de leurs bandes;
Ils sont si fiers de leur O' quand on les appelle.

Afin de nous éviter de perdre le nord,
Vous vous glissez, discret, sur globes et boussoles,
Et l'on vous sait gré, sur les cartes au trésor,
D'indiquer où le soleil rougit puis s'étiole.

Sans o, pas d'or, pas de dodo ni de dico,
Pas de vélo, de véto ni de vidéo,
Pas de comm, pas de blog et pas de photo,
Pas de mot, pas de métro ni de météo!

Vous êtes indispensable, un peu comme Zorro,
Vous êtes dans tous nos "Oh!" et dans tous nos "Hoho!"
Nos "Allô!", nos textos et nos colis postaux,
On vous voit partout mais vous n'êtes pas un zéro!

XOXO



Lettre O (Fotolia)

vendredi 5 février 2010

& Vases communicants

Quelqu'un a dit : « …pourquoi ne pas imaginer, le 1er vendredi de chaque mois, une sorte d’échange généralisé, chacun écrivant chez un autre ? Suis sûr qu’on y découvrirait des nouveaux sites… ».
Grâce à ces vases communicants, Gilles écrit une de ses belles et inimitables "Lignes de vie" ici et moi, je raconte une de mes esperluettes, là-bas, chez lui...
Un partage d'écriture et d'émotions...

Soif
texte de Gilles


Nous buvions des quarts d'eau coupés de vin.
Nous étions souvent sept ou huit assis les pieds dans le fossé, à l’ombre de la haie, dans l’odeur du foin sec. Les machines étaient arrêtées en travers du pré comme des pantoufles jetées au hasard ; les torses en sueur des garçons ressemblaient à des livrées d’hommes grenouilles sortant de l’eau ; sur des torchons de lin brodés à leurs armoiries, les femmes disposaient des tomates au col vergeté de cicatrices dures, une douzaine d'œufs durs au jaune presque noir, deux ou trois couronnes de pain de quatre livres, quelques fromages de chèvre cannelés de la paille du séchoir, un saladier encore entorchonné de morceaux de poulets. Les hommes ouvraient leurs couteaux, l’odeur fugace de l’acier de leurs lames s’additionnait à celle tendre et pâle du blanc des poulets. Hommes, femmes, enfants, nous parlions tous des différents états du foin.
La cruche en grès gris avait attendu au frais dans le fond du ruisseau, sous la haie, le col perlé de gouttelettes de condensation. Les bouteilles de vin tirées à la feuillette de la cave emmaillotées de journaux à demi couchées dans le panier d’osier. Le père versait un gros doigt de rouge dans le fond de chaque quart en fer blanc bosselé. L’odeur unie du vin et du métal flottait dans le parfum du foin. Nous prenions la cruche à plein ventre, un bras sous elle, et parmi les conversations son glouglou jetait à grandes respirations des paquets d’eau dans nos quarts. L’odeur du vin et du fer devenait moins aigre, moins acide, moins métallique, comme les groseilles sous le sucre.
Nous portions à nos lèvres le quart plein à raz bord. Par nos doigts serrés sur l'oreille de son anse, nous sentions le balourd de l’eau rosée osciller, aller, venir entre les bosses et les creux du fer blanc, parcourue de reflets vifs comme des gardons. Nous apposions nos lèvres sur le bord arrondi et le goût du métal mouillait nos palais. Puis nous inclinions le gobelet. Quand le liquide entrait dans nos bouches, nos dents crissaient.
Alors un long frisson alchimique nous parcourait, d'eau et de vin et de métal et, assis, nous repensions autrement à notre effort tout à l'heure, quand nous hissions les bottes de foin bleu sur les remorques tanguant dans le pré telles dans le lointain sur le canal les lentes péniches.
Jamais plus qu’en cet instant nous n’avons senti le bonheur d’être hommes, la simplicité sans phrase, l’évidence du travail ordonné en rangs réguliers sur ces remorques ventrues à l’ombres desquelles nous marchions, manche de la fourche sur l’épaule.
Jamais boisson ne fut plus simple, plus désaltérante, plus souvenante d’elle-même.
Ni temps plus clair que cet été.
Le travail fait.
L'eau et le vin dans le fer de nos quarts et tout ce foin sec devant nous.
Et notre belle soif.


Les autres vases communicants :

lundi 1 février 2010

& Elle disait...

La mort n'est rien,
je suis seulement passé, dans la pièce à côté.

Je suis moi. Vous êtes vous.
Ce que j'étais pour vous, je le suis toujours.

Donnez-moi le nom que vous m'avez toujours donné,
parlez-moi comme vous l'avez toujours fait.
N'employez pas un ton différent,
ne prenez pas un air solennel ou triste.
Continuez à rire de ce qui nous faisait rire ensemble.

Priez, souriez,
pensez à moi,
priez pour moi.

Que mon nom soit prononcé à la maison
comme il l'a toujours été,
sans emphase d'aucune sorte,
sans une trace d'ombre.

La vie signifie tout ce qu'elle a toujours été.
Le fil n'est pas coupé.
Pourquoi serais-je hors de vos pensées,
simplement parce que je suis hors de votre vue ?
Je ne suis pas loin, juste de l'autre côté du chemin.
Vous voyez, tout est bien.

(Poème attribué à Charles Péguy)


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