Les grands voyageurs du XIXème et du début du XXème siècle, curieux de découvrir la Tunisie, ont dû faire de bien jolis croquis des paysages magnifiques qu'ils rencontrèrent au gré de leurs périples.
Photo d'Ep', croquée par mon gentil ordi... |
D'après l'illustration de François Place dans son album "Les Derniers Géants" |
Dans leurs petits carnets de voyage, certains d'entre eux ont peut-être également griffonné quelques mots sur la colonisation, oups, pardon ! sur le "protectorat" français...
Selon leur orientation politique, soit ils ont évoqué avec satisfaction (voire avec délectation pour les plus fervents "protecteurs") les innombrables avantages et progrès de la colonisation et l'indiscutable supériorité de l’agriculture
européenne sur le mode de vie nomade et l’agriculture indigène; soit ils ont puissamment dénoncé l'indécence de la "bien-pensante" mise en valeur européenne dans les pratiques agricoles et se sont insurgés avec véhémence contre l'inacceptable aliénation forcée des terres, des pierres, des idées, des personnes et des coutumes locales. Mais, sur ce sujet, point de cladodes !
En 1956, la Tunisie accéda à l'indépendance. La violence de la lutte n’atteignit pas l'horreur des évènements en Algérie (ou fut-elle simplement moins médiatisée ?), mais comme pour le Maroc, la quête de l'autonomie en Tunisie ne se fit ni dans la douceur ni dans le respect. Ici non plus, pas de cladode en vue !
Mais alors, me direz-vous, "cladode": qu'est-ce ?
Ce sont ces larges coussins épineux que mes yeux ébahis ont vus sur des kilomètres et des kilomètres tandis que nous traversions la plaine tunisienne : des cladodes de nopal, des cladodes de nopal et encore des cladodes de nopal,
Ce sont ces arbustes aux épines acérées que Jules César aurait pu utiliser (de l'Opuntia ficus-indica) lors du siège d'Alésia mais comme il n'en avait pas, Julius se rabattit sur d'autres méthodes défensives. Quand t'as pas de nopal, tu prends du local !
C'est sur ces grosses raquettes pleines d'épines que poussent les savoureuses "handi", les "guergueb" ou encore le "Soltane El Ghalla" (le roi des fruits)... Vous l'avez deviné : sous tous ces noms "barbares" se cache le figuier de Barbarie.
[L'orgue de Barbarie est à la figue du même nom ce que la trompette bouchée est au cidre." (Pierre DAC, bien sûr!]
J'aurais pu intituler mon billet "Figui-haie" tant le nopal est abondamment utilisé pour délimiter les terres tunisiennes mais c'eût été moins drôle.
Le figuier de Barbarie est en effet le végétal par excellence (ce n'est pas le roi des fruits pour rien!) : barrière défensive ET barrière coupe-feu, il pousse dans les zones arides.
Son fruit est délicieux et rempli de trucs très chouettes pour la santé et pour la beauté : vitamine C, minéraux, oligo-éléments, grande teneur en fibres, faible apport calorique, et tout, et tout...
Et même les animaux peuvent manger ses cladodes... Les raquettes sèches servent de fourrage.
Et je dirais même plus : le figuier est également un monument chargé de l'histoire de la Tunisie...
Ici ou là, des champs de figuiers laissés à l'abandon cachent à peine les ruines d'anciennes fermes coloniales... Les vestiges oubliés du travail et de la souffrance des hommes.
Ailleurs, protégés par de belles haies de figuiers bien entretenues, les douars racontent un joli pan de l'histoire de la Tunisie... et là, le cœur du voyageur est réjoui.
Et si, par hasard, vous ne trouviez pas la panoplie complète du joueur de tennis chez votre fournisseur habituel de matériel de sport, plantez un arbre à cladodes dans votre jardin: vous aurez à volonté raquettes et balles colorées ! ;)
Et si, par hasard, vous ne trouviez pas la panoplie complète du joueur de tennis chez votre fournisseur habituel de matériel de sport, plantez un arbre à cladodes dans votre jardin: vous aurez à volonté raquettes et balles colorées ! ;)
Et comment parler de figues sans citer Paul Dullac, notre Escartefigue national... Peuchère!