Côté jardin, une sexagénaire bientôt "septu",
emmitouflée dans son manteau d'hiver,
les lunettes sur le bout du nez
et la mise en pli du mercredi
quelque peu alourdie
par une journée de neige...
Nous sommes dans un supermarché, à la caisse.
La petite mémé et la grande gamine ont rempli le caddie au bout du tapis.
"Les pommes et le lait, c'est pour toi, Mamie! (J'avais raison-euh!). Tout ce qui est de ce côté du caddie, c'est pour toi. Pour Juju et moi, y'a que les trucs-là, de ce côté!"
Et c'est là que commence l'intrigue! Une vraie pièce classique : unité de temps, de lieu et d'action...
Tandis que Juju attend pour récupérer sa carte bancaire alors que la caissière se démène avec une machine récalcitrante, j'observe les deux protagonistes de la scène...
Madame Mise en Pli vérifie, ligne après ligne, si le contenu du caddie correspond bien à ce qui est écrit sur le tout petit bout de papier et réajuste ses lunettes pour valider les prix.
Sitôt le rangement terminé, Miss Grosse Echarpe s'empresse de sortir son téléphone portable et se met à tapoter moult messages.
Mamie et petite-fille ne sont plus du tout connectées par les courses...
Et pourtant ! Toutes deux absorbées par leur activité plus que personnalisée, les yeux rivés sur leur papier ou clavier, elles discutent... Vi, vi! je vous promets.
D'un côté du caddie, la mamie explique, au fur et à mesure qu'elle valide ses courses et ce, sans lever une seule fois les yeux vers sa petite-fille, que le lait est moins cher ici qu'ailleurs, que les pommes sont bien plus belles que la semaine dernière, qu'elle espère que Minouminou aimera ces nouvelles croquettes...
A l'autre extrémité du caddie, dans une position quasi-symétrique, en contre-jour sur la grande baie vitrée du magasin, la petite-fille répond à sa grand-mère. Tout en continuant à taper sur les touches de son portable, sans lever une seule fois les yeux vers son aïeule, la jeune fille dit qu'elles l'avaient prévenue que c’était pas cher ici, qu'elle est contente que les pommes lui plaisent et que Minouminou n'est pas un chat difficile...
Juju a récupéré sa carte bancaire, salue la caissière, empoigne le caddie. Mamie et petite-fille la suivent, toujours sans lever les yeux... (Enfin, surtout Miss Echarpe !).
Les trois personnages sortent.
J'aurai longtemps à l'esprit l'image de ces deux personnes qui, sans se regarder une seule fois, ont réussi à parler de lait, de pommes et de Minouminou, de part et d'autre d'un caddie...
A l'époque de mon pote Jean-Bapt., plus connu sous le nom de Molière, les précieux, autrement dit les snobinards du XVIIème siècle, parlaient des "commodités de la conversation" lorsqu'ils parlaient des chaises.
Au XXIème siècle, les commodités de la conversation, ce sont les caddies !
emmitouflée dans son manteau d'hiver,
les lunettes sur le bout du nez
et la mise en pli du mercredi
quelque peu alourdie
par une journée de neige...
Côté cour, une jeune adulte
(sans doute la petite-fille de la sexa-septu!),
maquillée sans excès,
les cheveux longs lâchés sur les épaules,
petit blouson d'hiver à la mode,
énorme écharpe autour du cou,
jeans et bottines.
énorme écharpe autour du cou,
jeans et bottines.
Au centre, une jeune adulte
moins jeune que la précédente
mais assez jeune cependant
pour être l'autre petite-fille de la mémé à la mise en pli...
C'est elle qui paie les courses!
C'est elle qui paie les courses!
La petite mémé et la grande gamine ont rempli le caddie au bout du tapis.
"Les pommes et le lait, c'est pour toi, Mamie! (J'avais raison-euh!). Tout ce qui est de ce côté du caddie, c'est pour toi. Pour Juju et moi, y'a que les trucs-là, de ce côté!"
Et c'est là que commence l'intrigue! Une vraie pièce classique : unité de temps, de lieu et d'action...
Tandis que Juju attend pour récupérer sa carte bancaire alors que la caissière se démène avec une machine récalcitrante, j'observe les deux protagonistes de la scène...
Madame Mise en Pli vérifie, ligne après ligne, si le contenu du caddie correspond bien à ce qui est écrit sur le tout petit bout de papier et réajuste ses lunettes pour valider les prix.
Sitôt le rangement terminé, Miss Grosse Echarpe s'empresse de sortir son téléphone portable et se met à tapoter moult messages.
Mamie et petite-fille ne sont plus du tout connectées par les courses...
Et pourtant ! Toutes deux absorbées par leur activité plus que personnalisée, les yeux rivés sur leur papier ou clavier, elles discutent... Vi, vi! je vous promets.
D'un côté du caddie, la mamie explique, au fur et à mesure qu'elle valide ses courses et ce, sans lever une seule fois les yeux vers sa petite-fille, que le lait est moins cher ici qu'ailleurs, que les pommes sont bien plus belles que la semaine dernière, qu'elle espère que Minouminou aimera ces nouvelles croquettes...
A l'autre extrémité du caddie, dans une position quasi-symétrique, en contre-jour sur la grande baie vitrée du magasin, la petite-fille répond à sa grand-mère. Tout en continuant à taper sur les touches de son portable, sans lever une seule fois les yeux vers son aïeule, la jeune fille dit qu'elles l'avaient prévenue que c’était pas cher ici, qu'elle est contente que les pommes lui plaisent et que Minouminou n'est pas un chat difficile...
Juju a récupéré sa carte bancaire, salue la caissière, empoigne le caddie. Mamie et petite-fille la suivent, toujours sans lever les yeux... (Enfin, surtout Miss Echarpe !).
Les trois personnages sortent.
Fin de la scène.
J'aurai longtemps à l'esprit l'image de ces deux personnes qui, sans se regarder une seule fois, ont réussi à parler de lait, de pommes et de Minouminou, de part et d'autre d'un caddie...
A l'époque de mon pote Jean-Bapt., plus connu sous le nom de Molière, les précieux, autrement dit les snobinards du XVIIème siècle, parlaient des "commodités de la conversation" lorsqu'ils parlaient des chaises.
Au XXIème siècle, les commodités de la conversation, ce sont les caddies !