" Salut !
- ...
- J'ai dit : "Salut!"
- Mmmm...
- T'arrives d'où, toi ?
- Hein ?
- J'ai dit : "T'arrives d'où, toi ?"
- J'en sais rien !
- Tu ne sais pas d'où tu viens ?
- J'ai pas envie d'en parler !... Et toi, d'où tu viens ?
- Y'a deux jours (j'ai compté les nuits!), je me suis arrachée du sommet du grand érable que tu vois là-bas... J'te dis pas la descente de ouf !
Un bon coup de vent et hop, c'était parti pour le grand saut. Quelques centaines de copines, les jours d'avant, avaient pu virevolter tout en douceur, doucement décrochées et emportées par un petit vent léger. Moi, je n'ai pas eu cette chance. J'ai été violemment arrachée de ma branche pendant l'orage et la bourrasque m'a emportée. Ensuite, j'ai voltigé dans tous les sens, comme une folle, puis j'ai atterri au bout de ce chemin. Et là, à l'instant, un petit coup de vent m'a poussée jusqu'ici, à côté de toi... Et voilà !
- Ben dis donc, t'en dis des trucs en peu de temps...
- C'est que, vois-tu, je sais que d'un instant à l'autre, je peux être emportée par le vent. Si je parle lentement, je n'aurai pas le temps de finir de raconter mon aventure...
- Donc, tu viens d'un arbre ?
- Oui. Pas toi ?
- Non ! Mais comme toi, j'étais en hauteur, avec mes copines. On était bien aligné, les unes derrière les autres, sous la lumière... De temps en temps, on avançait d'une place. Puis à un moment, je me suis retrouvée devant. Tu peux pas savoir comme j'étais fière d'être enfin la première!
- Où elles sont passées tes copines qui étaient avant toi?
- Ben, jusqu'à ce que je tombe, j'en savais rien et puis j'ai compris le système: à chaque fois qu'on avançait d'une place, c'était que la première était tombée. Et je te dis pas la dégringolade... Pas de vent doux, pas de tapis de mousse pour amortir la chute... Non, non ! Je suis tombée la tête la première sur un toboggan en métal. De là, j'ai été propulsée contre une porte qui s'est brutalement ouverte et j'ai été saisie brusquement.
- Par quoi ?
- Aucune idée. C'était une espèce de grosse pince à cinq griffes colorées de bleu pailleté. Sans m'y attendre, une autre griffe bleutée m'a arrachée la tête et lentement, je me suis sentie disparaître. J'étais comme absorbée, comme vidée...
- C'est atroce ton histoire. Mais comment es-tu arrivée ici ?
- Je ne sais pas. Longtemps, j'ai été tenue par les griffes bleues. Puis, lorsque j'ai été complètement vide, j'ai été écrabouillée. Longtemps après, on m'a lancée en l'air de je ne sais où et je suis retombée ici.
- C'est super ! Alors comme moi, tu vas te décomposer et être utile à la nature ?
- Hélas, non! Je ne crois pas ! On m'avait dit qu'un jour, quand je serais vide, on me transformerait, on me "revaloriserait", on me recyclerait à condition que j'arrive dans une poubelle verte. Mais ici, sur ce bord de chemin, je vais mettre des années, des siècles pour disparaître..."
La conversation s'arrêta là car le vent d'automne emporta soudain la petite feuille d'érable...
Quelques jours plus tard...
"Mamie, regarde !
- Quoi, mon chéri?
- T'as vu, Mamie ? Y'a des gens qui ont jeté leur canette par terre au lieu de la mettre dans une poubelle verte !
- Oui, ils sont stupides mais on va arranger ça. On va la prendre dans notre sac poubelle en plastique et quand on arrivera à la maison, on la mettra dans notre poubelle verte.
- D'accord et on racontera à Papi ce qu'on a fait..."
Et la canette en aluminium, toute émue au fond du sac en plastique, versa sa dernière larme de soda.
Un bon coup de vent et hop, c'était parti pour le grand saut. Quelques centaines de copines, les jours d'avant, avaient pu virevolter tout en douceur, doucement décrochées et emportées par un petit vent léger. Moi, je n'ai pas eu cette chance. J'ai été violemment arrachée de ma branche pendant l'orage et la bourrasque m'a emportée. Ensuite, j'ai voltigé dans tous les sens, comme une folle, puis j'ai atterri au bout de ce chemin. Et là, à l'instant, un petit coup de vent m'a poussée jusqu'ici, à côté de toi... Et voilà !
- Ben dis donc, t'en dis des trucs en peu de temps...
- C'est que, vois-tu, je sais que d'un instant à l'autre, je peux être emportée par le vent. Si je parle lentement, je n'aurai pas le temps de finir de raconter mon aventure...
- Donc, tu viens d'un arbre ?
- Oui. Pas toi ?
- Non ! Mais comme toi, j'étais en hauteur, avec mes copines. On était bien aligné, les unes derrière les autres, sous la lumière... De temps en temps, on avançait d'une place. Puis à un moment, je me suis retrouvée devant. Tu peux pas savoir comme j'étais fière d'être enfin la première!
- Où elles sont passées tes copines qui étaient avant toi?
- Ben, jusqu'à ce que je tombe, j'en savais rien et puis j'ai compris le système: à chaque fois qu'on avançait d'une place, c'était que la première était tombée. Et je te dis pas la dégringolade... Pas de vent doux, pas de tapis de mousse pour amortir la chute... Non, non ! Je suis tombée la tête la première sur un toboggan en métal. De là, j'ai été propulsée contre une porte qui s'est brutalement ouverte et j'ai été saisie brusquement.
- Par quoi ?
- Aucune idée. C'était une espèce de grosse pince à cinq griffes colorées de bleu pailleté. Sans m'y attendre, une autre griffe bleutée m'a arrachée la tête et lentement, je me suis sentie disparaître. J'étais comme absorbée, comme vidée...
- C'est atroce ton histoire. Mais comment es-tu arrivée ici ?
- Je ne sais pas. Longtemps, j'ai été tenue par les griffes bleues. Puis, lorsque j'ai été complètement vide, j'ai été écrabouillée. Longtemps après, on m'a lancée en l'air de je ne sais où et je suis retombée ici.
- C'est super ! Alors comme moi, tu vas te décomposer et être utile à la nature ?
- Hélas, non! Je ne crois pas ! On m'avait dit qu'un jour, quand je serais vide, on me transformerait, on me "revaloriserait", on me recyclerait à condition que j'arrive dans une poubelle verte. Mais ici, sur ce bord de chemin, je vais mettre des années, des siècles pour disparaître..."
La conversation s'arrêta là car le vent d'automne emporta soudain la petite feuille d'érable...
Quelques jours plus tard...
"Mamie, regarde !
- Quoi, mon chéri?
- T'as vu, Mamie ? Y'a des gens qui ont jeté leur canette par terre au lieu de la mettre dans une poubelle verte !
- Oui, ils sont stupides mais on va arranger ça. On va la prendre dans notre sac poubelle en plastique et quand on arrivera à la maison, on la mettra dans notre poubelle verte.
- D'accord et on racontera à Papi ce qu'on a fait..."
Et la canette en aluminium, toute émue au fond du sac en plastique, versa sa dernière larme de soda.