samedi 5 décembre 2009

& Les amoureux qui s'bécotent...

Dans mon billet sur la lettre B pour définir le mot "banc", j'écrivais :
B comme Banc : siège de solitude ou d'amour, de rencontre ou de détresse, de lecture ou de repos, d'adolescence ou de vieillesse, de spectacle ou d'école.

Objet banal de mobilier urbain ou de décoration de jardin, le banc n'est, en fait, qu'une simple planche, un peu surélevée, destinée à recevoir le postérieur de plusieurs personnes en même temps.
Mais qu'il soit en bois, en pierre, en plastique, en béton, en fer, en carton, en papier mâché... et souvent très inconfortable lors d'un usage prolongé, le banc est un livre d'histoires à lui tout seul. C'est qu'il lui en arrive des trucs, au banc et qu'il en a vu des fessiers!

Depuis ses origines, le banc vit des aventures humaines, politiques, sentimentales, financières, judiciaires extraordinaires alors que l'homme ne fait guère attention à lui.
On l'installe (sans jamais lui demander son avis, d'ailleurs!) dans des lieux spécifiques afin de permettre aux galopins de travailler, aux galériens de ramer, aux galapiats d'être jugés, aux galants et galantes de se reposer en posant leur popotin pour papoter...

Il eut sa place d'honneur dans les écoles et de très nombreuses générations d'élèves y ont frotté et usé leur fonds de culotte.
Sous les chapiteaux de cirque et dans les réfectoires, dans les petites salles de spectacle et les grandes salles de conférence, dans les kermesses et les fêtes foraines, dans les églises et les temples, et même dans les chars à bancs, le banc est roi.

Le banc ne choisit rien, ni le lieu, ni les gens, ni le moment, ni l'histoire, mais il vit tout, il connaît tout de nos vies.

& Il connaît depuis des centaines d'années les couples d'amoureux qui s'bécotent.
& Il connaît depuis très longtemps la dame qui donne du pain aux oiseaux et s'en retourne vers sa vie dont il ne sait rien puisqu'elle ne parle jamais.
& Il connaît cet homme cravaté qui vient manger son sandwich sous les platanes du boulevard et qui oublie de mettre son papier gras dans la poubelle voisine.
& Il connaît, depuis de nombreuses générations, tous ces groupes d'adolescents qui viennent parler de tout et de rien, refaire le monde ou faire n'importe quoi, dire et taguer des mots d'injure ou d'amour.
& Il connaît ces jeunes parents qui regardent avec tendresse leur petit garçon qui réussit enfin à faire du vélo sans roulettes.
& Il connaît cet homme sans âge, qui chaque soir, quand le lieu est désert, vient s'allonger sur lui, se couvre d'étoiles et s'endort peut-être pour toujours.
& Il connaît cette jolie étudiante qui, à la belle saison, vient travailler une ou deux heures à l'ombre des tilleuls.
& Il connaît cette femme et cet homme qui, un jour, sont repartis ensemble, du même côté de l'allée...
& Il connaît la dame au chien qui vient se reposer quelques minutes avant de repartir pour "faire pisser Mirza"...
&
Il connaît le pépé au journal qui lit son quotidien en commençant par la fin et qui va boire son petit café chez Jojo...

Il est dommage qu'un banc ne garde que les microbes de ses usagers et quelques graffitis car s'il pouvait écrire ses mémoires, nous aurions à lire un gigantesque recueil d'humanité.

Illustration : "Georges Lebanc" de Claude Ponti, Ed. Ecole des Loisirs, 2003

28 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  2. Tu oublies le convalescent qui essaye une santé sur ce banc
    tu oublies les commères avant que ça dégénère
    tu oublies les nouvelles mamans et leur première sortie avec leur enfant
    tu oublies les mamies fières avec leur filleul dont tu feras bientôt partie inchallah

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  3. Je n'ai pas oublié, chère Lilia, mais certains de mes visiteurs me reprochent d'écrire de trop longs billets alors j'ai dû faire des choix...
    Et puis il faut bien que je laisse un bout de banc à mes visiteurs...

    Pensées d'Epamin"

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  4. Il en est même qui fleurent bon l'iode quand ils sont de poisson, ou que l'on trouve, dans les squares, par trois pour former un triple banc.

    Magnifique hommage à ces humbles bancs qui, sans jamais rien demander en échange, offrent toujours généreusement un petit coin de repos : vivent les bancs donneurs ! :~)

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  5. Plein d'histoires ces bancs, oui. Et je suis toujours un peu fâchée quand j'en vois un cassé et non réparé ou bien , Horreur ! , quand dans le métro il furent remplacés par des machins en plastique penchés où tu ne sais pas quelle fesse faire tomber. Ben oui, ils dorment où alors les clodos que je voyais se réveiller à 5h30 à l'ouverture du métro parisien quand je partais prendre du service ??? (pfff Il y a belle lurette de ça !) . Hein ? Ils vont où ?
    PUBLICS les bancs, c'est comme cela qu'on les aime. Comme tu le dis : à tous, pour tout et tous les goûts. Des brins de vie, quoi..."espaluetins" en somme...
    Lôlà

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  6. C'est la semaine du banc ? ;o)

    Image qui m'est venue en débutant la lecture de ce billet plein d'humanité, c'est celle des clochards parisiens allongés sur ce lit d'inconfort.

    Merci pour le lien graffiteux.

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  7. merci pour le bout de banc. Ca me permet de placer une scène de banc très courante, surtout dans les films policiers ou d'espionnage : le banc double. 2 protagonistes assis dos à dos se refilent des informations en chuchotant.

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  8. @ Tant-Bourrin =>
    Je suis bien contente d'avoir partagé mon banc un instant avec toi... et d'avoir profité de tes savoureux jeux de mots.

    @ La Tortue légère =>
    Merci pour ta colère face aux absurdités urbaines... Je me fâche avec toi et pense aux sans-abri.

    @ Yanik =>
    (Entre nous, je déteste cette mode de la semaine de... ou du jour de la ... qui voudrait dire que le reste du temps, on s'en fout!)
    Lorsque je me couche, je pense très souvent aux hommes, aux femmes et aux enfants qui n'ont pas de lit et je me sens si impuissante...
    Le lien graffiteux me semblait évident!

    @ Choule =>
    Voui, voui, j'ai complètement oublié les bancs doubles pour agents doubles!
    Bonne idée et merci de la visite qui me fait un GRAND plaisir.

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  9. J'ai juste un truc à dire : EXCELLENT !
    Oh et puis finalement j'en ai un deuxième :
    SUPERBE !
    J'ai adoré !
    Inutile de demander si vous aimez la chanson de Brassens "bancs publics" ?
    Vous allez peut-être devoir songer à publier un de ces quatre dans un vrai livre, pour que les bénéficiaires de tels merveilles soient en plus grand nombre !
    Bien à vous.

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  10. Merci de penser à ces sièges accueillants qui passent inaperçus et dont, pourtant, on ne pourrait se passer.
    J'aime le dessin de Claude PONTI, j'adore la chanson de Brassens et je te dédie, pour tes mots choisis et pour tes esperluettes inspirées un "banc d'honneur" !
    Tu le mérites bien !

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  11. ah j'ai oublié de préciser aussi, que j'aime vraiment beaucoup cette photos choisie sur le banc !
    ça semble être un détail de revenir faire un commentaire juste pour ça, mais je sais ô combien ce n'est pas toujours évident de trouver ce qu'on veut, puis de choisir LA photo en adéquation avec le texte !

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  12. Tu as le secret des billets qui rendent le lecteur heureux. Cette justice rendue au banc, ce grand méconnu, le premier des poètes maudits, fondateur d'une école qui contient toutes les autres sans dire un mot ni écrire un vers, est un pur délice! Merci Epamin'.

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  13. @ Mathilde =>

    Je ne sais que dire devant tant de compliments à part MERCI.
    Je n'ai pas grand mérite puisque je parle des choses qui me tiennent à cœur. De plus, comme j'ai le souci permanent de faire plaisir à mes fidèles ou ponctuels visiteurs, le texte vient tout seul.

    C'est vrai que j'apporte, comme la plupart des blogueurs, un soin tout particulier au choix des illustrations. Claude PONTI, auteur de littérature pour jeunesse est un écrivain assez atypique et comme j'apprécie ses images, je voulais ici lui rendre hommage avant de faire un petit billet sur lui.

    Je vous ai répondu par mail en ce qui concerne les gadgets en marge.

    Pensées endimanchées.

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  14. @ La Licorne

    Encore des compliments! Un merci sincère.
    Merci aussi de tout cœur pour le banc d'honneur (que je trouve moins aberrant que la légion d'honneur attribuée, selon moi, un peu n'importe comment et à n'importe qui... je ferme la parenthèse!)

    Un bouquet de pensées épaminées.

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  15. @ Le Coucou =>
    Ta première phrase me comble de joie car je sais tes exigences en matière de beaux billets alors je suis touchée.

    J'attendais le début des frimas pour évoquer ce banc qui va servir de lieu de vie à de nombreux sans-abri pour lesquels nous, nous ne pouvons rien, hélas.

    Je t'envoie mes amicales pensées et j'attends impatiemment ton rébus dominical.

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  16. a-t-on jamais
    calculé le nombre
    de paires de fesses
    qui utilisèrent ces bancs ?

    ,O)

    oui, oui
    je vais (mieux) après une
    vilaine sinusite migrainante !


    gezib' d'ici

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  17. Idée: installer un compteur de fesses sous les bancs publics...
    De temps en temps, un gagnant...

    Merci pour la 'tite visite et prends soin de toi!

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  18. Je trouve ce billet super pro-banc ! héhé :)

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  19. Le banc est-il un accessoire de la panoplie d'Arnaud ? ;o)

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  20. le banc qui était pile en face de la cantine au lycée ..à l'époque j'étais très amoureuse , en silence , trop timide ,d'un certain J-M , et la tablée que nous étions, 5-6 de la même classe, s'alignait pour papoter sur ce fameux banc avant la reprise des cours .
    Chaque jour j'espérais , le cœur battant ,pouvoir être assise à côté de l'élu , car alors , malgré les gros manteaux d'hiver , nos bras étaient en contact , clà me donnait de la chaleur pour le reste de la journée .
    Mais hélas , pas de bécots , jamais, sur ce banc là , ni avec celui-là...

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  21. Tout pareil, Croukougnouche (les initiales pour moi, c'étaient J.-F. ...).
    Ah, les bancs de la cantoche!

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  22. Encore une esperluette fabuleuse.
    Tendresses, douce Epamin'

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  23. Installation des bancs communaux à Oberhoffen-sur-Moder (près d'Haguenau) :

    http://www.dailymotion.com/video/xa9ptw_installation-des-bancs-communaux-08_news?from=rss

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  24. @ Grimimi =>
    Simplement des mots pour dire des choses qui me tiennent à cœur.
    Mais ça fait quand même plaisir de savoir que certains d'entre vous aiment bien mes esperluettes.
    Donc un grand merci à toi Grimimi!

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  25. Pas mal ces bancs: difficile de les casser ou de les endommager, me semble-t-il!
    Par contre, je pense qu'à ce jour, installés depuis le mois d'août, ils doivent être recouverts de graffitis en tous genres, non?
    De belles prises pour les amateurs de mots dans la ville et dans la campagne...

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  26. Pas très loin d'ici.. trois bancs m'accueillent pour mes poses solitaires du midi.
    En fonction de la saison, mes pas me portent vers celui qui reçoit l'ombre du chêne ou celui qui est en plein soleil. Le troisième étant mi-à l'ombre mi au soleil.

    Pour cette période hivernale je les ai quelque peu abandonnés. Je passe devant eux de temps en temps. Ils sont là. Ils attendent des jours moins humides et plus chaleureux.

    Je les regarde avec attention, et je les salue silencieusement (fidèles compagnons).

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  27. J'aime vraiment beaucoup, en plus de ta visite (merci!), ton salut silencieux à tes amis les bancs...
    "Objets inanimés, avez-vous donc une âme?" qu'il a dit le poète! ben, les bancs, voui!

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  28. A chaque pluie les microbes des usagers sont noyés ! Catastrophe !!!

    SNAKE

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Vous êtes désormais un p'tit bout de ma vie...
Merci d'être passé(e) par ici!

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