samedi 28 décembre 2013

& BON AN !


J'ai répondu au DÉFI DU SAMEDI ainsi :



BON AN ! sans mal an...

Cet an, je le proclame, je vous offrirai mes vœux sans accent!
Au repos, vous tous, mots suscrits d'aigu, de grave ou de circonflexe!
Rentrez dans vos boistes aux lettres, voyelles et diacritiques complexes !
Je veux, pour le nouvel an qui vient, souhaiter aux gens du monde,
Aux nombreux et lointains cousins de notre terre toute ronde,
Aux souriants voisins de ma rue, aux enfants du boulevard,
Au facteur du quartier, au balayeur de trottoirs,
Aux vendeurs de choux-fleurs comme aux dames des cantines,
Aux trop "grands" de ce monde, aux travailleurs des usines,
Aux femmes, aux hommes, aux familles, aux enfants,
Aux malades, aux bien-portants, aux rabat-joies, aux contents,
Aux gens aperçus ici, ailleurs, avant, maintenant, un jour,
Aux miens amis, aux proches si loin, aux chers amours…
Je veux souhaiter d'une voix universelle et sans le moindre accent,
Dans la langue vraie du cœur et des nobles sentiments,
Un an nouveau tout rempli de joie, d'amour et de douceur,
De chants vers un ciel sans larmes, de danses sur une terre sans pleurs,
Un monde d'air frais, d'eau limpide, d'aubes roses et de nature,
De sourires, de caramels, de mains ouvertes et de cœur pur.



samedi 21 décembre 2013

& Conte de Noël

Fragile oisillon aux ailes déjà brisées par la vie et par les oiseaux prédateurs, il n'a fait que passer au milieu de notre grande volière. 
Au milieu des pépiements et des babillages de nos poussins, il a commencé à soigner ses blessures, à panser son cœur, à voir le soleil... Peu à peu, il a senti la douceur de l'amitié des autres et sous la bienveillance des grands, il a eu envie d'apprendre, d'écrire, de lire...

Puis il l'a vue!

Il s'est arrangé pour lui prêter sa gomme, pour lui ranger son cartable, pour la protéger discrètement contre les casse-pieds de la cour, pour lui demander un conseil mais jamais il ne s'est rangé à côté d'elle: elle aurait refusé; jamais il ne lui a dit combien il la trouvait belle et intelligente: elle ne l'aurait pas écouté; jamais personne n'a rien su du doux regard qu'il portait sur elle...

Puis la vie et les grands ont décidé qu'il devait changer de volière, partir ailleurs, s'éloigner de certains dangereux vautours... Et il a emporté son image avec lui...



Hier, dans la boîte aux lettres, j'ai trouvé une enveloppe portant une écriture maladroite d'enfant.
Puis j'ai eu les yeux tout piquetés de paillettes...

A l'intérieur, une grande page écrite à l'ordinateur:

"BONJOUR MADAME LA DIRECTRICE.

POUVEZ-VOUS S'IL VOUS PLAÎT DONNER CETTE CARTE A ... QUI EST DANS LA CLASSE DE ....

MERCI. "

Puis une feuille pliée en quatre, simple carte faite avec un ordinateur, portant juste un coeur et une boule de Noël dorée...

Je ne vous dirai rien du message écrit dans cette simple carte de Noël mais je crois que c'est la plus belle déclaration d'amour que j'aie jamais lue...


JOYEUX
à vous tous et à ceux que vous aimez !

dimanche 15 décembre 2013

& Corridor


Je laisse à Tom Hanks et à John Coffey la ligne verte et leur terrible couloir de la mort.
Je laisse aux médecins du monde et aux ONG les fragiles couloirs humanitaires.
Je laisse aux pilotes de lignes et à la Patrouille de France les couloirs aériens qui emmènent ailleurs...
Je laisse aux hérissons, aux crapauds et aux chevreuils les couloirs écologiques, ces "passages protégés" comme les haies ou autres crapauducs qui leur permettent de se déplacer en sécurité. 
Mais je garde, pour mon plus grand plaisir,  les couloirs de mon école remplis de rires d'enfants et de décorations multicolores...

Il est un autre couloir qui a une grande place dans ma vie: le couloir rhodanien...

Rhodanien ?
"Rhodanien: se dit de la phase tectonique intrapliocène (environ -3 millions d'années), définie dans les Alpes occidentales..."  Vous ne le saviez pas ? Ben moi non plus ! Mais maintenant, si !

Pas de panique ! Vous ne lirez pas ici un billet théorique sur les strates géologiques ou sur les risques sismiques en Provence. Ayons juste une pensée pour les victimes du terrible tremblement de terre de juin 1909 qui fit tant de dégâts sur les communes de Lambesc, de Rognes, de Saint-Cannat, de La Barben, de Venelles, de Pélissanne, de Vernègues, du Puy-Sainte-Réparade et même de Salon-de-Provence. Vous ne saviez pas que ça avait tremblé si fort, là-bas ?  Ben moi, si... mais je n'y étais pas! 




Soleil de Langres
Mon couloir rhodanien à moi : se dit d'un sillon situé entre le Massif central et les Alpes, toujours en phase avec les vacances, les valises, les voies, les voyages, les véhicules, les voitures, la vie et emprunté des dizaines (des centaines ?) de fois par l'Ep' depuis des décennies.

Cette semaine, en plein cours de géographie sur les régions, j'ai eu une révélation : j'ai roulé toute ma vie presque exclusivement sur le côté est de la France, entre Champagne, Lorraine et Provence et toute ma vie, en toutes saisons, j'ai arpenté le couloir rhodanien dans les deux sens pour voir ma famille, pour changer d'air, pour aller voir ailleurs...

Si la Bretagne, les Châteaux de la Loire, l'Ile d'Oléron, la Vendée, les Landes, Narbonne, l'Ardèche et Paris ont eu assez de charme et de renommée pour me faire changer de cap le temps d'un été, je n'ai pas suivi, année après année, l'évolution de leur paysage...


Par contre, je peux vous raconter tout APRR et tout VINCI... et même avant, quand les autoroutes n'étaient alors que des tronçons...
Les champignons de l'aire de Jugy




Je peux vous réciter presque par cœur l'A31, l'A6, l'A7, l'A8 :
La Porte du Soleil
  • le Soleil de Langres,
  • les cours d'eau (Beurk! la Femme Sans Tête... Wouaouh, le Rhône !),
  • les péages,
  • la ligne de partage des eaux,
  • le Signe de l'Infini versus le Tunnel sous Fourvière, 
  • les sorties,
  • les ponts,
  • les raffineries de Feyzin,
  • la Porte du Soleil,
  • les aires de repos (trop mimi les champignons de Jugy! géniaux les brumisateurs géants ! si plaisantes les tables de pique-nique dans les bois!)
  • et surtout les panneaux d'animation d'autoroute, dits de type H...
Qui c'est qui sait qui c'est qui les fait ?

Panneau d'animation sur la ligne de partage des eaux
J'étais encore gamine quand ces grands panneaux réalisés en camaïeu sépia (j'aime bien!) apparurent sur mon chemin.
Leurs dessins stylisés, visibles et lisibles en un coup d’œil me firent regarder ce que je ne faisais que voir jusque là et découvrir ce que j'ignorais. J'ai appris des tas de trucs grâce à ces tableaux "de maîtresse".
Ils nous rendent également curieux car ils nous racontent ce qui se passe un peu plus loin, là-bas, de l'autre côté des collines en nous faisant glisser un instant de l'autre côté des glissières d'autoroute. Ils nous donnent envie de sortir à la prochaine sortie pour aller voir, goûter, lire, écouter, photographier, admirer...  J'ai même l'impression que leurs graphismes deviennent plus précis, plus détaillés et qu'on en apprend encore plus...

J'adore Mornas et sa forteresse, Romans et ses chaussures, Beaune et ses toitures, Nogent et ses couteaux, Niépce et son appareil photo, Mirecourt et ses luthiers...

Les Lumières avaient l'Encyclopédie de D’Alembert, les phares de nos voitures éclairent l'encyclopédie de l'APRR...
C'est ça les Temps Modernes !

Au fait,  depuis le temps que je cours dans ce couloir et malgré mes nombreux voyages, je n'ai même pas ma carte de télépéage !


Merci aux automobilistes qui ont réalisé ces très belles photos dans "mon" couloir !

dimanche 1 décembre 2013

& Dac ? D'accord !

"Ce n'est pas 
parce qu'en hiver 
on dit 
"Fermez la porte, 
il fait froid dehors!", 
qu'il fait moins froid 
dehors 
quand la porte est fermée."

Pierre DAC  (1893-1975)   Humoriste et comédien français

dimanche 24 novembre 2013

& Je souris


Je ne les connais pas.
Je les croise chaque matin.
Je roule; ils marchent.
A moi la chaussée; à eux le large trottoir.

Dès que je les aperçois, je souris. Pour de vrai!
Je souris parce qu'ils sont là, tous les deux, toujours.
Je souris parce que je les croise au même endroit qu'hier, alors que je ne suis pas à la minute près.
Je souris parce que les gouttes qui ruissellent, les feuilles qui s'envolent ou les flocons qui tourbillonnent les amusent.
Je souris parce que je vois les fils invisibles qui lient leurs deux petites silhouettes rondes.
Je souris parce que leurs pas sont à l'unisson des battements de leurs deux cœurs. 
Je souris parce que sans rien me dire, ils me parlent d'humanité, de générations, d'amour, de tendresse.

Je souris parce que j'aime ce qu'ils me racontent en silence...
Je souris parce que je les aime...

Lui, le petit lutin joufflu, cartable de 6ème sur le dos, encore trop petit et habitant trop loin pour aller au collège tout seul.
Elle, la petite dame dodue, le cabas dans une main, le sac à main dans l'autre,  si heureuse de faire un bout de chemin avec le gamin avant d'aller au magasin.

Je ne les connais pas et pourtant, je sais leurs noms: il s'appelle "Mon p'tit chéri" et elle s'appelle "Mamie".


Trop mimi...

 Ambiance vacances de Sylvie Fiant


 Retour vers le futur...


 Avec Mamé Santon Gonzague

Mamie geek : un click à l'endroit, un click à l'envers...


mercredi 20 novembre 2013

& C'est l'histoire d'un...

...livre d'histoire !

Le jour où je l'ai retrouvé, au fin fond d'un vieux carton, dans mon école actuelle, mes yeux s'illuminèrent...
"Mon" livre d'histoire de CE2 !
Celui-là même, dont les pages, depuis tant d'années conservées dans ma mémoire vive, me servent de repères historiques, chronologiques, culturels, iconographiques voire philosophiques, même encore aujourd'hui, je l'avoue...

Lui!


Je vous avais bien dit ici, que je vous en parlerais...

Je l'avais de nouveau là, entre les mains et je pouvais tout à loisir le feuilleter, parcourir chaque page à la recherche de ce petit détail qui avait enchanté, surpris ou choqué mes yeux d'enfant.
Absolument identiques à mes souvenirs, ils étaient tous là, page après page, dans le même ordre, dans les mêmes postures avec les mêmes expressions du visage entourés des mêmes objets... et en les retrouvant, j'ai souri.

De Clovis faisant de l'équilibre sur son pavois à ce poilu lisant une lettre au fond de sa tranchée, en passant par le facétieux Jean-Baptiste Poquelin ou l'enthousiaste Bernard Palissy brûlant tous ses meubles, tous ces personnages m'accompagnent depuis toujours quand je parle de notre histoire de France.

Au fil du temps, j'ai juste approfondi ce que j'avais appris et bien appris en CE2. Mais je dois avouer que souvent, je fus bien déçue de constater que mes "chouchous" d'antan (Vercingétorix, Du Guesclin, Henri IV, Colbert, Saint-Louis...) étaient en réalité bien différents de ce que nous avait enseigné ma chère, très chère Mme GEORGES. Quant à ceux que je considérais jadis comme des "vilains", j'ai découvert qu'ils étaient plus que vilains !

Pourtant, même si je ne sais pas encore tout sur tous, je garde une certaine estime pour quelques-uns de ces hommes que j'ai rencontrés au cours de l'année 1969/1970 : Pasteur, Brazza, Jean Jaurès, Abd-el-Kader, Sully, Hoche, Gutenberg, Saint-Vincent-de-Paul et même ce sacré Charlemagne...

Et pour le petit enfant que vous étiez, qui était votre personnage historique préféré ?

 
 
Henri IV  pour Tant-Bourrin et Andiamo

La Pucelle de Domrémy pour Marité

Saint-Louis pour Doucy 

 Colbert pour ALN03

 Duguesclin et ...

 ...Hoche pour Yanik

samedi 16 novembre 2013

& Wi-Fi

Si je vous dis "Wi-Fi", vous pensez numérique, communications virtuelles, nouvelles technologies... et c'est normal.
Si je vous dis "Mont Blanc", vous pensez Savoie, alpinisme, neiges éternelles et blancheur immaculée. Évidemment !
Et si je vous parle de nid et d'oisillons, des images bucoliques de vert printemps traversent votre esprit.

Eh bien aujourd’hui, je vais, comme d'habitude, faire gigoter vos neurones et un peu comme les artistes cubistes déstructurent les objets et les visages, je vais bousculer vos idées reçues...

Jadis, je les préférais "Wi-Fi". La simple idée d'en trouver, d'en voir, me donnait la nausée. On devait me rassurer, me jurer qu'il n'y en avait pas pour que j'accepte de me lancer dans l’aventure. Puis un jour, je ne sais pourquoi, j'ai changé de système de communication et de mode de consommation : je n'ai plus voulu de "Wi-Fi", bien au contraire. Des fils, j'en voulais, j'en voulais et j'en veux encore. Plus il y a de fils, plus je suis heureuse et meilleures elles sont...

En ce qui concerne le toit de l'Europe, je n'irai pas par quatre chemins: j'adore le Mont-Blanc mais pas quand il est blanc, au contraire ! Moi, le Mont-Blanc, je l'aime presque noir ou jaune pâle ou vert ou brun, parfois avec des petits points...

Quant aux oisillons pépiant au fond de leur nid de mousse et gentiment nourris par leur maman (ou leur papa!), j'ai passé des heures et des heures à les écrabouiller entre mes mains d'enfant, à les tordre en tous sens, à les traire...



Je vous avais dit que je ferais gigoter vos neurones...
Alors maintenant que vos synapses ont été soumises à rude épreuve, vous avez droit à quelques explications qui devraient vous mettre l'eau à la bouche!

Jadis, je préférais "les pâtes Wi-Fi", les pâtes sans fil. La simple idée de trouver des fils de fromage fondu, d'en apercevoir dans mon assiette, me donnait la nausée. On devait me rassurer, me jurer qu'on n'avait pas ajouté de fromage dans la casserole pour que j'accepte de manger. Puis un jour, je ne sais pourquoi, j'ai changé de goût et de mode de consommation : je n'ai plus voulu de pâtes Wi-Fi, bien au contraire. Des fils de fromage, j'en voulais, j'en voulais et j'en veux encore. Plus il y a de fromage, plus il y a de fils, plus je suis heureuse et meilleures sont les nouilles...

En ce qui concerne le toit de l'Europe, je n'irai pas par quatre chemins: j'adore le Mont-Blanc mais pas quand il est blanc, au contraire ! 
Moi, la crème Mont-Blanc, je l'aime au chocolat, au praliné, à la vanille... 
Quand j'étais petite, pour nous faire plaisir, maman nous servait souvent de la crème Mont-Blanc au dessert, le samedi soir, avant de regarder l'émission...
de Maritie et Gilbert Carpentier!






Quant aux oisillons pépiant au fond de leur nid de mousse et gentiment nourris par leurs parents, oui, j'ai passé des heures et des heures à les écrabouiller entre mes mains d'enfant. Mais quelle idée aussi de placer ces petites bêtes sur nos délicieux berlingots de lait Nestlé sucré d'autrefois...
On les tordait dans tous les sens, ces pauv' piafs, on les roulait, déroulait, pressait, pour extraire la dernière goutte de lait de nos berlingots.

Il faut dire que c'était vraiment très bon et que le lait dans les gros tubes, si faciles à utiliser pourtant, n'avait pas le même goût sur nos papilles d'enfants...

Bon, c'est quand qu'on mange ?




Blague wifi sur Mister Blague
Les Alpes, photo Ep', si, si, en allant en Crète

samedi 2 novembre 2013

& L'effet colibri

Je me souviens de ce bel Ardéchois des temps anciens... Ardéchois Cœur fidèle, qu'il s'appelait !





Mais en ce jour d'octobre 2013, à la télé, c'est un autre Ardéchois que j'aperçois; hélas, je n'ai pas le temps de suivre l'émission...



Deux jours après, La Licorne publie ça sur son blog "Fabulo".


Le soir même, en allant assister au spectacle de Zaz, j'ai les yeux qui piquent quand elle raconte la légende amérindienne du colibri...
Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés, atterrés, observaient impuissants le désastre. Seul le petit colibri s’activait, allant chercher quelques gouttes avec son bec pour les jeter sur le feu. Après un moment, le tatou, agacé par cette agitation dérisoire, lui dit : « Colibri ! Tu n’es pas fou ? Ce n’est pas avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ! »
Et le colibri lui répondit : « Je le sais, mais je fais ma part. »

Puis mes yeux piquent encore un peu quand elle chante "Si", magnifique chanson écrite par Jean-Jacques Goldman puis quand elle présente simplement le mouvement colibri...

Alors l'effet colibri, c'est quoi ? C'est comme l'effet papillon ?


Non, non! L'effet colibri, c'est ça :

C'est une douce et belle utopie humaniste, initiée par Pierre Rabhi (l'Ardéchois numéro 2!) qui implique que les humains réveillent leur conscience, s'insurgent et agissent:
  • pour préserver ce qu'ils reçoivent de la Nature en l'utilisant de manière réfléchie et équilibrée, 
  • pour que la notion de profit ne soit plus le moteur de nos existences,
  • pour être heureux avec peu.


Les thèmes de réflexion et d'action sont : se nourrir, habiter, se déplacer, éduquer, se soigner, s'épanouir.

Les actions sont individuelles, personnelles mais additionnées les unes aux autres, elles peuvent modifier la société et la rendre plus écologique, humaine, épanouissante, responsable.

"Être un colibri", c'est donc être un humain sans aile mais qui invente, qui expérimente un "truc" qui donne des ailes pour mieux vivre en commun en respectant la nature et l'être humain.

Bon, c'est quand qu'on s'y colle, Ybri ?

 

lundi 28 octobre 2013

& Conversations d'automne



" Salut !
- ...
- J'ai dit : "Salut!"
- Mmmm...
- T'arrives d'où, toi ?
- Hein ?
- J'ai dit :  "T'arrives d'où, toi ?"
- J'en sais rien !
- Tu ne sais pas d'où tu viens ?
- J'ai pas envie d'en parler !...  Et toi, d'où tu viens ?
- Y'a deux jours (j'ai compté les nuits!), je me suis arrachée du sommet du grand érable que tu vois là-bas... J'te dis pas la descente de ouf ! 
Un bon coup de vent et hop, c'était parti pour le grand saut. Quelques centaines de copines, les jours d'avant, avaient pu virevolter tout en douceur, doucement décrochées et emportées par un petit vent léger. Moi, je n'ai pas eu cette chance. J'ai été violemment arrachée de ma branche pendant l'orage et la bourrasque m'a emportée. Ensuite, j'ai voltigé dans tous les sens, comme une folle, puis j'ai atterri au bout de ce chemin. Et là, à l'instant, un petit coup de vent m'a poussée jusqu'ici, à côté de toi... Et voilà !

- Ben dis donc, t'en dis des trucs en peu de temps...


- C'est que, vois-tu, je sais que d'un instant à l'autre, je peux être emportée par le vent. Si je parle lentement,  je n'aurai pas le temps de finir de raconter mon aventure...
- Donc, tu viens d'un arbre ?
- Oui. Pas toi ?
- Non ! Mais comme toi, j'étais en hauteur, avec mes copines. On était bien aligné, les unes derrière les autres, sous la lumière... De temps en temps, on avançait d'une place. Puis à un moment, je me suis retrouvée devant. Tu peux pas savoir comme j'étais fière d'être enfin la première!
- Où elles sont passées tes copines qui étaient avant toi?
- Ben, jusqu'à ce que je tombe, j'en savais rien et puis j'ai compris le système: à chaque fois qu'on avançait d'une place, c'était que la première était tombée. Et je te dis pas la dégringolade... Pas de vent doux, pas de tapis de mousse pour amortir la chute... Non, non ! Je suis tombée la tête la première sur un toboggan en métal. De là, j'ai été propulsée contre une porte qui s'est brutalement ouverte et j'ai été saisie brusquement.




- Par quoi ?
- Aucune idée. C'était une espèce de grosse pince à cinq griffes colorées de bleu pailleté. Sans m'y attendre, une autre griffe bleutée m'a arrachée la tête et lentement, je me suis sentie disparaître. J'étais comme absorbée, comme vidée...
- C'est atroce ton histoire. Mais comment es-tu arrivée ici ?
- Je ne sais pas. Longtemps, j'ai été tenue par les griffes bleues. Puis, lorsque j'ai été complètement vide, j'ai été écrabouillée. Longtemps après, on m'a lancée en l'air de je ne sais où et je suis retombée ici.
- C'est super ! Alors comme moi, tu vas te décomposer et être utile à la nature ? 
- Hélas, non! Je ne crois pas ! On m'avait dit qu'un jour, quand je serais vide, on me transformerait, on me "revaloriserait", on me recyclerait à condition que j'arrive dans une poubelle verte. Mais ici, sur ce bord de chemin, je vais mettre des années, des siècles pour disparaître..."

La conversation s'arrêta là car le vent d'automne emporta soudain la petite feuille d'érable...






Quelques jours plus tard...

"Mamie, regarde !
- Quoi, mon chéri?
- T'as vu, Mamie ? Y'a des gens qui ont jeté leur canette par terre au lieu de la mettre dans une poubelle verte !
- Oui, ils sont stupides mais on va arranger ça. On va la prendre dans notre sac poubelle en plastique et quand on arrivera à la maison, on la mettra dans notre poubelle verte.
-  D'accord et on racontera à Papi ce qu'on a fait..."

 Et la canette en aluminium, toute émue au fond du sac en plastique, versa sa dernière larme de soda.





vendredi 25 octobre 2013

& La mémère a cent ans...

Lisse et pâle comme était la peau des belles dames d'antan, la centenaire est peu marquée par les ans. On sent, ici ou là, un grain de peau un peu rugueux, une petite cicatrice brune, quelques minuscules taches de vieillesse mais si peu... Et pourtant, cent ans de lavage, de frottage, de gommage, de maquillage et de démaquillage, ça use un peu...


Eh bien non ! Malgré son grand âge, la vieille dame est toujours rayonnante dans la lumière du soleil et régulièrement, elle se parfume de douces fragrances de lavande, de muguet ou de violette.
Elle tente d'être discrète et reste souvent dans un petit coin de la pièce, sans bouger. Pudique, elle se voile parfois la face mais elle devient toujours l'objet de l'attention de tous ceux qui l'approchent.
Ses douces rondeurs d'antan la rendent attendrissante et son style art nouveau fait d'elle une reine de beauté au charme désuet, un peu comme les belles dames peintes par Mucha.


Bien solide sur ses petits pieds, elle supporte encore aujourd'hui de lourds fardeaux et reçoit sans fléchir tout ce qu'on lui impose.
Les petits enfants l'adorent car elle a toujours un petit banc près d'elle et comme elle est petite, elle leur inspire confiance.
Elle a partagé l'intimité de nombreuses personnes mais en dépit de tout ce qu'elle a vu et de tout ce qu'elle a entendu, elle n'a jamais dévoilé aucun des secrets qu'on lui a confiés.


Certaines personnes peu respectueuses de nos aînées la laissent toute seule dehors, la considérant comme une simple potiche, comme un vulgaire pot de fleurs. C'est sans doute que leur centenaire est moins bien "conservée" que la mienne !





Car voyez-vous, la belle centenaire à qui je rends hommage dans ce billet, c'est... ma p'tite baignoire. Une vieille baignoire sabot en fonte émaillée, toute habillée de carrelage, coincée au fond d'une toute petite pièce et qui a été installée dans cette maison dans les années 1910. Ma propriétaire n'a pas voulu enlever cette baignoire et finalement, j'en suis ravie... 
De même, le petit lavabo est d'époque: pas très pratique mais rustique!

Ma mémère a cent ans...



... et elle ne fuit pas!

Oeuvres d'un des maîtres de l'Art Nouveau: Alphonse MUCHA
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