Lorsqu'on circule en voiture et que l'on se trouve momentanément immobilisé en ville, soit par des feux tricolores qui ne passent jamais au vert, soit à cause d'un embouteillage causé par le passage de la famille de Nénesse l'escargot, ou par toute autre forme de ralentissement, on a le temps de regarder et c'est drôlement bien.
Enfin, moi, je trouve!
Enfin, moi, je trouve!
Un des éléments de façades accessibles à nos regards quand on est en voiture, c'est le soupirail.
Vous soupirez! (Je n'allais pas ne pas la faire, quand même!)
Oui, le soupirail, cette petite ouverture pratiquée en bas d'un édifice, m'inspire.
Je ne parle pas de ces "trous" servant de bouches d'aération au vide sanitaire, non, non!
Je parle de ces petites fenêtres qui apportent lumière et air frais aux espaces souterrains, aux caves et aux sous-sols.
Le soupirail, qui fut d'abord fenêtre de cuisine, voui, voui, dans les maisons bourgeoises, se transforma en simple lucarne de cave lorsque la cuisinière et son tablier, le fourneau et sa plaque en fonte, le valet et sa livrée et le majordome s'installèrent au rez-de-chaussée.
Mais cela n'empêcha pas les architectes de l'époque de rivaliser d'ingéniosité, d'imagination et de talent pour donner à ces quelques centimètres carrés, des allures de chefs-d'œuvre de ferronnerie.
Et c'est ce que j'aime: admirer les volutes de fer forgé, torsadé, identifier fleurs et rosaces, suivre les arabesques et trouver les pompons... Autant de détails artistiques qui, à l'époque de la révolution industrielle, donnèrent l'occasion aux artisans ferronniers de prouver leur savoir-faire (fer!)...
Et c'est ce que j'aime: admirer les volutes de fer forgé, torsadé, identifier fleurs et rosaces, suivre les arabesques et trouver les pompons... Autant de détails artistiques qui, à l'époque de la révolution industrielle, donnèrent l'occasion aux artisans ferronniers de prouver leur savoir-faire (fer!)...
A l'intérieur comme à l'extérieur, imaginez un peu l'ampleur de ses mémoires... Le soupirail voit tout, entend tout, sent tout, et depuis au moins cent ans!
Il a vu les voitures hippomobiles devenir automobiles, les vélocipèdes se transformer en vélo-solex ;
il a vu se raccourcir les jupes des belles dames et les escarpins à hauts talons prendre la place des bottines à boutons ;
il a entendu les chanteurs et les crieurs des rues et il entend aujourd'hui les sonneries des téléphones portables;
il a connu le bruits des sabots et le bruit des bottes et il connaît aujourd'hui le bruit des rollers et des planches à roulettes;
il a longtemps senti le pain frais du fournil et sent désormais les gaz d'échappement des voitures...
il a vu se raccourcir les jupes des belles dames et les escarpins à hauts talons prendre la place des bottines à boutons ;
il a entendu les chanteurs et les crieurs des rues et il entend aujourd'hui les sonneries des téléphones portables;
il a connu le bruits des sabots et le bruit des bottes et il connaît aujourd'hui le bruit des rollers et des planches à roulettes;
il a longtemps senti le pain frais du fournil et sent désormais les gaz d'échappement des voitures...
On lui a glissé des messages et murmuré des secrets,
on lui a dit des mots d'amour et il a sauvé des vies,
on lui a chantonné des refrains et confié des plans,
il a servi de cachette et on l'a éclaboussé de sang.
Le soupirail, qui a avalé des tonnes de boulets de charbon, est souvent muré ou défiguré aujourd'hui pour éviter d'avaler ordures, mégots, saletés et poussières...
Mais aujourd'hui, comme hier, il côtoie, sans pouvoir rien faire, ceux et celles qui n'ont pas d'abri, pas de lit et peu d'amis. Les mendiants, les gueux, les SDF, les disloqués de la vie, les petits bonshommes sur le carreau sont les habitués du soupirail.
Et ce qui ne change pas non plus, c'est qu'il a bu et boit encore de nos jours, et ce, bien malgré lui, des litres de pisse de chiens et de chats (et d'animaux à deux pattes qui se reconnaîtront!).
Autrefois trou à misère, le soupirail glissait dans la vie de pauvres hères un fin trait de lumière. Aujourd'hui, il éclaire des ateliers, des archives, des coffres et on l'a blindé...
On oublie qu'il existe, on oublie de le regarder, on ne sait rien de lui et pourtant, si on le retire de notre histoire, de nos histoires, il n'y a plus d'histoire(s)!
(Soupir!)
(Soupir!)
Si Andersen lisait ton texte, il serait jaloux, où il te piquerait l'idée pour écrire en conte les mémoires d'un soupirai. C'est charmant, comme d'habitude! Très bon week-end du 1er Mai, Epamin'.
RépondreSupprimerComme il est beau ce soupirail !
RépondreSupprimerComme l'histoire de cette ouverture est bien étudiée !
Comme j'aime lire ce que tu écris !
Merci Epamin' et bonne nuit. DOUCY
Wow! J'en soupire d'envie!
RépondreSupprimerQuel sublime soupirail! Magnifique. Merci de partager!
Zed ¦)
Ton magnifique billet est un petit rayon de soleil pour la France d'en bas, celle du sous-sol ! :~)
RépondreSupprimerlà, tu m'illumines!!
RépondreSupprimerComment, douce Epamin', tu succombes aux charmes vénéneux du soupirail.
RépondreSupprimerCette bouche au souffle putride, cet orifice maléfique aux exhalaisons morbides ! Soupir, aïe ! Soupirail ! Que de misères sordides, que d'infamies sans nom tu as éclairé parcimonieusement.
Et tout d'un coup, après que des cohortes de plumes trempées dans un mélange de suie, d'urine et de sang, aient tour à tour décrit des scènes macabres et des actes immondes, notre Epamin' arrive, la plume virevoltante, gorgée de ciel bleu et de rosée , et d'un battement de cils elle donne au soupirail des quartiers de noblesse, une grâce que personne jusqu'alors n'avait su déceler.
J'appelle ça un tour de force ! Sans méconnaître le sombre passé du soupirail urbain tu l'éclaire d'un jour nouveau, tu l'habilles de lumière, et ce n'est pas commun.
@ Le Coucou
RépondreSupprimerJ'ai les joues rosies par l'émotion: Andersen!... Jaloux de mon soupirail!
C'est trop d'honneur que vous me faites, l'ami et je vous en remercie.
Ici, le muguet et la fête du travail ce sera, hélas, les pieds dans l'eau!
Bon 1er mai à toi aussi!
@ Doucy
RépondreSupprimerMerci pour ce compliment
qui me fait penser aux petits "compliments"
que j'écrivais jadis à ma douce maman!
Bon 1er mai, Doucy!
@ Air fou
RépondreSupprimerBien contente que ce soupirail te fasse soupirer d'aise... J'aime beaucoup l'art nouveau...
Bon 1er mai, Air fou!
@ Tant-Bourrin
RépondreSupprimerEn cette journée de fête du travail, c'est ma façon "déguisée et muguetée" de rendre un hommage sincère aux "petites gens", aux travailleurs de l'ombre, aux oubliés de la vie, à ceux d'en bas, comme tu le dis si bien...
Une de mes aïeules fut domestique à Paris au XIXème siècle...
Ce billet est pour toi, Anna!
Bon 1er mai, Tant-Bourrin!
Ben tiens, vais regardez le soupirail différemment maintenant ! Hop, ça me fait aussi penser aux travaux de MAthilde là > Je vous regarde par le soupirail !
RépondreSupprimer@ Sylvie
RépondreSupprimerAlors, je suis contente et je te remercie.
Bon 1er mai, amie Sylvie!
Quel enchantement de vous lire,
RépondreSupprimercomme la caresse du vent,
la chaleur d'un soleil montant,
la beauté d'une fleur des champs....
Je n'ai pas de facilitée, avec les mots,
je les apprécie d'autant plus chez ceux,
qui ont, comme vous,
le don de les mettre en scéne, pour le plaisir,
du lecteur....
MERCI....
et au grand plaisir de vous lire a nouveau...
Belle, douce, journée a vous,
amicalement claire
@ Olivier
RépondreSupprimerQue veux-tu que je réponde à tant de gentillesse et de compliments!!!???
Je dirai juste: MERCI!
Bon 1er mai, ami Olivier!
@ Arf
RépondreSupprimerJe vais voir ça tout de suite.
Bon 1er mai, ami Arf!
(Mention spéciale pour toi: que le muguet de cette journée t'apporte vraiment une belle fête de travail... ;O))
@ Claire
RépondreSupprimerMerci pour vos mots gentils qui me font plaisir.
Plein de muguet parfumé pour vous, en ce 1er mai!
Le croissant du petit matin acheté au travers du soupirail, tout chaud, tendu par les blanches mains enfarinées du boulanger. Je crois que c'est Francis Carco qui en parlait ?
RépondreSupprimerAndiamo,
RépondreSupprimerOui, le grand Francis Carco offre une belle place au soupirail dans "L'homme traqué".
En réponse à Carco, je propose Rimbaud et son poème "Les effarés"
Noirs dans la neige et dans la brume,
Au grand soupirail qui s'allume,
Leurs culs en rond,
A genoux, cinq petits, - misère ! -
Regardent le Boulanger faire
Le lourd pain blond.
Ils voient le fort bras blanc qui tourne
La pâte grise et qui l'enfourne
Dans un trou clair.
Ils écoutent le bon pain cuire.
Le Boulanger au gras sourire
Grogne un vieil air.
Ils sont blottis, pas un ne bouge,
Au souffle du soupirail rouge
Chaud comme un sein.
Quand pour quelque médianoche,
Façonné comme une brioche
On sort le pain,
Quand, sous les poutres enfumées,
Chantent les croûtes parfumées
Et les grillons,
Que ce trou chaud souffle la vie,
Ils ont leur âme si ravie
Sous leurs haillons,
Ils se ressentent si bien vivre,
Les pauvres Jésus pleins de givre,
Qu'ils sont là tous,
Collant leurs petits museaux roses
Au treillage, grognant des choses
Entre les trous,
Tout bêtes, faisant leurs prières
Et repliés vers ces lumières
Du ciel rouvert,
Si fort qu'ils crèvent leur culotte
Et que leur chemise tremblote
Au vent d'hiver.
Les sous-sols, on y voyait pas trop les bonnes, plutôt sous les combles, mais les concierges, les cochers... Quelquefois, ils donnent de plain-pied sur le jardin, cela leur donne de la noblesse.
RépondreSupprimerEt dans les étages, quand ils sentent monter de chez les pauvres une odeur de soupe, ils raillent d:^)
Merci, Saoulfifre, pour ce petit précis d'histoire sociale.
RépondreSupprimerBon premier mai!
Quel plaisir , cette mise en lumière de ces petites bouches d'ombre..!
RépondreSupprimerJe ne sais pourquoi, moi aussi elles m'ont toujours intriguée .
tu en décris tellement bien le contexte ,la vie!
Un été , à Chalons sur Saône ,au moment du festival de rue , en flânant dans la ville entre les moments de spectacle , j'avais eu la lubie de photographier ces fenêtres à soupirs , dès que j'en trouvais une sur mon passage . Je ne sais plus où j'ai mis ces photos.. prise dans la ville de Niepce , avec un appareil "à l'ancienne"
Allez, allez, retrouve-moi ces clichés tout vite... En plus chez le photo-génique Nicéphore, c'est fort!
RépondreSupprimerBon 1er mai!
quel talent!...
RépondreSupprimersoupirer d'aise ...
RépondreSupprimermince je voulais l'écrire
-O))
euh ..
RépondreSupprimer( ) <= soupire-je ..
=)
Passionnant et instructif pour moi qui connaissait de loin les soupirs mais peu les soupireux. Un soupirail une soupirette ?
RépondreSupprimerTout à coup je pense à ces films à Londres ou aux States où il y a beaucoup "d'entresols" et où on descend depuis le trottoir pour aller chez quelqu'un.
Soupirailler ?
Je soupi-raille
Tu soupi-railleras ?
Très jolie cette ode au soupirail !
RépondreSupprimerJe crois qu'il vaut mieux le regarder de l'extérieur et imaginer ce qui a pu ou peut encore se passer dans ce lieu sombre séparé de la lumière par des barreaux protecteurs.
Être à l'intérieur, même si on y est caché, ressemble beaucoup à de l'enfermement.
A quoi, tu me fais réfléchir un dimanche après-midi ...
Bonjour Epamin',
RépondreSupprimerUn peu de retard... mille excuses!
De jeudi matin 08:00 à samedi 13:30, (heure de Montréal, Qc.) ces heures étaient consacrées à mon petit prince Th.
C'est encore une esperluette signée par la grande Epamin. J'ai un soupir d'espoir en pensant qu'un jour des enfants, de 7 à 77 ans, achèteront dans les librairies un livre magique :
"Les Esperluettes d'Epamin"
Je t'envoie des becs sue-crés pour te remercier d'avoir encore accroché à mes lèvres des sourires.
Sue xx
Ahhh... les entresols de Londres dont les fenêtres donnent sur un mur et ce minuscule puit de lumière en rez de trottoir; descente souvent accrobatique surtout en rentrant tard du pub d'en face!! J'ai 'mon' soupirail aussi: doux bruit d'une vieille typo (Heidelberg)- on dirait un moulin à vent- et odeur d'encre.... Mummm Merci Ep' Bizen
RépondreSupprimerTrès joli texte...jolie balade à ras de trottoir...j'ai appris plein de choses...Merci, Epamin' !
RépondreSupprimerSoupirail! Encore un mot que mes petits-enfants ne connaissent pas!
RépondreSupprimer"objets inanimés avez-vous donc une âme
Qui s'attache à notre âme
Et la force d'aimer..."
amicalement
Bonjour Epamin',
RépondreSupprimerTu as manqué mon "Roudoudou".
Il t'attend bien calé dans les bras de "Ma Puce".
Becs sue-crés xx pour Clément
@ Flo
RépondreSupprimerMerci!
Quand je vois ce que tes mains savent faire, je te renvoies le compliment!
@ Mr. M
RépondreSupprimerIl y a les plus pire, les moins pire et les sous-pire!
@ Manue
RépondreSupprimerUn soupir, ça fait une petite pause en musique.
Un soupirail, ça fait quoi?
@Lôlà /Zou
RépondreSupprimer"entresol" = "sous-pierraille" ?
@ Yanik
RépondreSupprimerMerci pour le compliment!
Tout à fait exact: les images que l'on a de l'intérieur du soupirail montrent souvent le "dehors" comme un lieu inaccessible, interdit, dont on est privé...
Philosophe, Messire Yannick!
@ Grimimi
RépondreSupprimerMerci pour tant de compliments que je sais sincères...
Je suis bien heureuse que tu aies pu longuement profiter de ton pretit Prince.
Quant à rencontrer ton Roudoudou, ces temps-ci, je n'ai guère de temps pour lire les blogs amis...
Pardon à toutes et à tous!
Pensées épaminées.
@ Bizen
RépondreSupprimerA l'homme qui écrivait avec un moulin à vent...
Biz to Bizen
@ La Licorne
RépondreSupprimerMerci pour ton gentil commentaire!
@ Mimens
RépondreSupprimerIl nous appartient donc d'être des mamies "passeuses" de soupiraux!
Belle journée mamie Mimens!