lundi 10 mars 2014

& Sur la fine étamine...

Odette Toulemonde, héroïne éponyme (ne pas confondre avec la frangine d'Azelma!) de la comédie franco-belge diffusée à la télé ce mois-ci, est plumassière. Ma nounou "de quand j’étais toute petite", elle, était brodeuse de paillettes. Non, on ne dit pas "pailleteuse" parce que "pailleteuse" ça veut dire chercheuse d'or, orpailleuse et ma nounou n'habitait pas dans une cabane en planches près d'une rivière du Far-West, ne passait pas ses journées à jouer dans l'eau avec une grosse passoire et n'avait pas de batée dans sa batterie de cuisine.

Non, ma nounou avait ça:
 et ça:
et aussi plein de ça:

Quand elle me ramenait de l'école et que j'avais fini de goûter, j'allais dans la pièce où était son métier à broder et je la regardais faire.
Je n'ai plus aucun souvenir de son visage, de sa maison ni même de son nom (faudra que je demande à qqn!) mais son métier à broder et ses interminables colliers de paillettes de toutes les couleurs sont là, dans ma mémoire.
D'abord, sur un grand cadre, elle tendait avec précision un morceau de tissu à broder: du tulle, de l'éTamine (!), de l'organza,  de la percale, de la soie, du linon (mais non, pas du Nylon!), du taffetas, de la mousseline, de la dentelle... Rien que des jolies étoffes douces, de luxe et qui coûtent cher...
La technique et le matériel pour bien tendre le tissu sont spécifiques: des mortaises, des coutisses, des tirettes...


Le motif à broder était dessiné sur le tissu.
D'une main, "ma" brodeuse tenait son crochet de Lunéville, de l'autre main, sous le tissu, sa longue aiguillée de paillettes. 
Eh, oui, broder des paillettes se fait à l'aveugle, à l'envers du tissu ! C'était en se fiant à son seul toucher qu'elle égrenait un par un, tels les grains d'un chapelet, les minuscules sequins de métal, de nacre ou de plastique pour les fixer par un fin point de chaînette avec son crochet! Sans habiter à Lunéville, ma nounou faisait de la broderie de Lunéville!

Comme leurs ancêtres, les brodeuses de Lunéville du dix-neuvième siècle ont d'abord fait de la délicate et fine dentelle pour les colifichets des élégantes et riches dames. Mais pour survivre face aux ateliers mécaniques, Louis Ferry (rien à voir avec le Jules!) s'inspira du point de Beauvais et imagina la broderie perlée: broder avec des perles, des paillettes, des sequins... Les brodeuses utilisèrent toujours le point de chaînette pour réaliser leurs merveilles mais en remplaçant leur aiguille par un crochet, les "Lunévilleuses" (Lunévilloises brodeuses!) purent exécuter leur broderie plus rapidement, plus précisément et créer de véritables œuvres d'art. 

Ma nounou était une artiste mais à l'époque, je n'en savais rien !

Mon arrière-grand-mère brodait, ma grand-mère cousait, ma maman brode, ma fille fait des merveilles et je sais qu'elles sont des artistes!
Palmettes d'un châle folklorique brodé par ma maman
Le châle en entier

24 commentaires:

  1. Très intéressant, ce procédé des paillettes.
    Mais tu sais, tu brilles sans, aussi.

    ;-)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je ne suis pas très paillettes, strass ou autres trucs qui brillent... Est-ce parce que je me trouve assez lumineuse? Si c'est toi qui le dis, merci ! ;o)

      Bises d'Ep'

      Supprimer
  2. J'ai perlé une robe du soir...aie les yeux !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. A la fin, on a des paillettes plein les yeux... sans fard!

      Supprimer
  3. Ma grand'mére avait brodée tout le bas d'une jupe fronçée ( grande largeur ) ...
    Joli travail mais il faut de bons yeux et de la patience ....
    Bisousssss

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. As-tu hérité du talent de ton aïeule ?
      Le travail de broderie de nos ancêtres embellissait véritablement de simples pièces de linge. Et comme elles étaient fières, ces futures mariées de montrer leur trousseau avec leurs initiales!
      Bises d'Ep'

      Supprimer
  4. Superbe! J'adore!

    Bonne semaine et gros câlinss!!!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Contente que tu aies apprécié, Claire!
      Sourire d'Ep'

      Supprimer
  5. Moi aussi j'aime faire toutes ces jolies choses mais sans le crochet de Lunéville. Avec une aiguille on peut aussi faire des merveilles et point après point le sujet apparait comme par enchantement.
    Ta Nounou était une artiste en effet car pour arriver à la fin de l'ouvrage, il faut patience,bons yeux et des doigts-non pas de fée- mais sans trop d'arthrose .....
    Merci de donner tant de détails sur tous les instruments qui permettent de faire un si beau travail.
    BIZZZ de DOUCY.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'ai demandé à mes parents le nom de cette nounou...C'était il y a si longtemps qu'ils ne s'en souviennent plus! De plus, il paraît que je ne suis pas restée très longtemps chez elle mais il est évident que son travail m'a impressionnée, la preuve!

      Comme je le montre dans mon billet avec le travail de ma maman, la broderie avec une simple aiguille fait aussi merveille!

      Bises d'Ep'

      Supprimer
  6. très belle broderie perlée à Lunéville, bravo les brodeuses méticuleuses, précision. Amicalement. Renée69

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Renée pour cette visite dans le nord-est et pour le sympathique commentaire.
      Sourire d'Ep'

      Supprimer
  7. Quel travail de fée! C'est magnifique. Je n'aime pas, moi non plus, les profusions de paillettes, mais un petit accessoire judicieusement étoilé nous rend encore plus lumineuse...un peu comme un maquillage discret, en somme.
    Gros bisous Ep

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Une robe de paillettes, ça se porte sur un tapis rouge avec plein de photographes tout autour ou bien près d'un carosse-citrouille ou sous une peau d'âne... Dans une salle de classe, c'est moins pratique... et comme tu le dis si bien, nous avons besoin de trois fois rien pour éclairer... nos élèves!
      Bises de la jonquille Ep'

      Supprimer
  8. Que c'est beau ! Ta nounou était une artiste .
    Je suis allée à Lunéville et j'ai le souvenir des faîences , mais pas de ces jolies broderies en perles .
    Je n'aurai pas la patience de faire cela.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il reste très peu de "lunévilleuses" et leurs ateliers sont tout petits. C'est vrai que la faïencerie attire davantage et cela "s'exporte" plus facilement.
      Il faudra donc revenir en Lorraine......
      Sourire d'Ep'

      Supprimer
  9. Que c'est joli. Et j'adore tes histoires...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Anne!
      Que c'est joli aussi chez toi! Et j'adore tes couleurs!
      Sourire d'Ep'

      Supprimer
  10. On en apprend des choses quand on vient ici ! J'admire la technique.
    Je reviendrai ;)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Santoline pour cette aimable visite matinale...
      Oui, cette technique est admirable et je souhaite que ce patrimoine perdure encore longtemps!
      On n'a qu'une vie et si on garde toutes les belles choses de ce monde pour soi, si on ne partage pas, je trouve ça triste !

      Belle journée à toi Santoline, ensoleillée et pleine de doux délires!
      Sourire d'Ep'

      Reviens quand cela te chante (j'aime beaucoup cette expression! )

      Supprimer
  11. 40 ans se sont écoulés depuis ma visite à Lunéville où j'étais allée avec ma tante "expatriée"en Lorraine Elle n'a pas du penser que ceci pouvait m'intéresser Je suis retournée à Metz , il y a deux ans .Mais pas à Lunéville.!J'aime beaucoup la Lorraine et l'Alsace .
    Belle journée , Ep'
    Tu n'as jamais essayé de faire classe en robe à paillettes ?
    Nicole

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Pour sûr l'amie que j'ai déjà fait classe en paillettes, à Carnaval: en reine de la lune (chapeau qui passait à peine sous les portes!), en princesse (robe à crinoline, vi madame!) , en clown (moult fois mais ça ne doit pas t'étonner!), en sorcière, en Joséphine (l'impératrice, pas Mimi Mathy!) et même en ...galette des rois!

      Belle journée en bouchures, Nicole

      Sourire d'Ep'

      Supprimer
  12. Joli billet, joli "reportage" mais dis donc je connais le Linon, la guipure; la mousseline; l'organza; et l'organdi... Et même la zénana ! ! Non mais des fois !
    Il est vrai qu'autrefois j'ai connu de jolies Demoiselles couturières...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Andiamo!
      Dis donc, tu en connais des trucs de filles... et elles ont bon dos les demoiselles couturières... Tu parles là de tissus légers, vaporeux,... Quant à la zénana, ce n'est pas qu'un tissu... ;o)

      Supprimer

Vous êtes désormais un p'tit bout de ma vie...
Merci d'être passé(e) par ici!

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...